Je ne pensais pas pouvoir être un jour déçue par Melvil Poupaud, c'est chose faite, la faute principalement à un réalisateur qui est passé à côté du sujet passionnant de la confrontation de deux idéaux de représentation esthétique, au profit d'une histoire sensuelle inaboutie. Les quelques tentatives d'innovation filmique laissent elles aussi un sentiment d'inachevé en se réduisant à d'anecdotiques incrustations qui paraissent plus gratuites qu'émanant d'une volonté avérée de faire sens. Le fait d'avoir concentré l'intrigue sur les séances de pose ne m'a pas déplu en soi, c'est davantage le traitement des conséquences de ces séances qui me gêne, tant l'écriture des deux personnages principaux aurait pu faire l'objet d'un approfondissement évident: le tourment d'Attiret comme les souffrances contemplatives d'Ulanara sont tout juste exposées; la solitude de l'impératrice Ulanara transparaît sans habiter pleinement à mes yeux le film. Le Portrait interdit me donne l'impression que le réalisateur n'a pas su se décider sur un point de fuite qui aurait aidé à l'agencement et à la profondeur de son histoire. La tentation du jésuite, l'errance de l'impératrice, le choc esthétique entre la Chine et la France catholique: voilà trois pistes qui auraient pu donner lieu à une fresque fascinante et qui ont produit un film d'1h40, non sans intérêt, mais sans véritable grandeur.