Pierre et Babou,couple d'enseignants,reçoivent à dîner dans leur appartement parisien leur meilleur ami Claude et Vincent,le frère de Babou,accompagné d'Anna,son épouse enceinte.C'est une bonne soirée qui s'annonce,tout le monde,sauf Anna,se connait depuis l'enfance,tout le monde s'aime,on est content de se voir et tout roule.Mais Vincent met vite le feu aux poudres en faisant croire aux autres qu'il va attribuer à son enfant à naître un certain prénom.Une violente controverse s'ensuit,qui va déboucher sur une série de disputes et de règlements de comptes sur fond de secrets familiaux qui va aller crescendo.Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte sont ici réalisateurs,scénaristes et coproducteurs de ce film adaptant leur pièce qui avait triomphé au théâtre.Pathé et TF1 avaient flairé le bon filon en acceptant de produire l'oeuvre,qui sera effectivement un grand succès cinématographique.Souvent on se complique la vie au cinéma avec de la technique,des décors pharaoniques,des costumes et des maquillages,alors qu'il suffit parfois de cinq personnages coincés dans un appart pendant une heure et demie pour obtenir un très bon résultat.C'est ce qu'on appelle du théâtre filmé et les auteurs marchent ici sur les traces de leurs glorieux prédécesseurs du Splendid,remember "Le Père Noël est une ordure",ou Francis Veber,voir "Le dîner de cons"."Le prénom" n'est pas du niveau des films précités,mais ça reste quand même une des grandes réussites du genre.Ce qui compte dans ces cas-là est bien sûr la qualité de l'écriture,et principalement les dialogues.On est amplement servi avec ce jeu de massacre en forme de spirale infernale qui entraîne des personnages a priori normaux et civilisés dans un inexorable engrenage de violence verbale qui ira jusqu'à de l'affrontement physique.La plaisanterie de Vincent peut sembler être une mauvaise blague alors qu'en réalité,en plus d'être très drôle,elle est très intelligente dans la mesure où elle est révélatrice de l'étroitesse d'esprit des bobos gauchos qui font pourtant sans cesse profession d'ouverture.Ainsi il y aurait des prénoms qui existent officiellement,qui sont au calendrier,qui ont été beaucoup portés,mais qu'on n'aurait désormais plus le droit de donner à des enfants sous prétexte que certains personnages célèbres peu recommandables en ont été baptisés,tout cela au nom de lois non écrites mais validées implicitement par la bien-pensance,comme si c'était ces prénoms qui étaient la cause du comportement des malfaisants en question.C'est totalement con mais conforme à la doxa moderne,ce que le film souligne cruellement.Mais ça ne s'arrête pas là car au-delà de cette histoire de prénom l'hypocrisie,les non-dits et les secrets qui régissent les rapports humains volent en éclat et passent les protagonistes au lance-flamme.Surgissent donc au grand jour la prétention,la tartuferie et même les problèmes d'érection du très gauchiste Pierre,l'arrogance et l'intolérance d'enfant gâté de Vincent,les préjugés sur la supposée homosexualité de Claude,qui vont susciter quelques révélations croustillantes de nature à chauffer encore plus l'ambiance,la frustration de Babou et,à propos de prénoms,l'aveu d'Anna concernant ce qu'elle pense de ceux des mômes de Pierre et Babou,les ridicules Apollin et Myrtille,typiques de la bobosphère.Le repas convivial prend peu à peu des allures de combat de tranchées et confirme que toute vérité n'est pas bonne à dire,l'être humain étant par nature égocentrique et malveillant.C'est pessimiste,mais pourquoi s'illusionner?L'efficacité du film tient à la qualité d'une écriture virtuose,mais aussi au jeu millimétré de comédiens inspirés qui avaient bien en main leurs rôles pour les avoir longuement interprétés sur les planches.Toute la distribution théâtrale a en effet été reconduite,à l'exception de Jean-Michel Dupuis qui incarnait Pierre et a été remplacé par Charles Berling pour la version ciné.C'est sans doute une exigence de la production,Pierre étant avec Vincent le personnage principal du récit et nécessitant donc la présence d'un acteur bankable.Il faut reconnaître que ça fonctionne car Berling ne joue pas Pierre,il l'est.On sait que le mec est un indécrottable bobo,qui partage tous les traits de caractère du crétin qu'il incarne.Face à lui se tient un fabuleux Patrick Bruel,horriblement à l'aise en droitard brillant qui perd peu à peu les pédales devant la tournure inattendue que prennent les évènements qu'il a initiés.Guillaume de Tonquédec est comme de coutume parfait en faux homo gérontophile et sensible qui cache bien son jeu.Belles performance également de Valérie Benguigui en épouse soumise qui se révolte brusquement et de la splendide Judith El Zein en femme enceinte dépassée par le bazar dans lequel elle est inopinément tombée.Françoise Fabian fait de petites apparitions en mère bavarde et Yaniss Lespert ouvre le film en livreur de pizzas.