Après Batman Begins au succès planétaire et relançant la saga du chevalier noir de manière ultra moderne et avant The Dark Knight et le triomphe critique et spectateur, Christopher Nolan a réalisé Le Prestige. En commençant la projection, on s'attend à une autre histoire de magiciens comme on a déjà pu en voir avec une flopée de stars à l'affiche. Le résultat est tout autre.
Le Prestige est un film complexe, comme tous ceux de Nolan, avec un scénario élaboré de telle manière qu'il embrouille le spectateur, le mène sur de fausses pistes, agrémenté de plus ou moins gros twists et des personnages qui subissent plus qu'ils n'agissent, comme destinés à suivre un itinéraire inhabituel. Et en ce sens, c'est sûrement son plus réussi. Pour une simple et bonne raison : la magie. Il est tellement rare de voir à ce point les images et l'histoire entrer en alchimie de cette façon, de manière à confondre tous les éléments, toutes les pièces du puzzle, toutes celles du spectacle. Car c'est ce que le film est : un tour de magie. Construit comme tel, Nolan va même jusqu'à nous expliquer clairement en quoi consiste un tour de magie et ses trois étapes fondamentales. Le Prestige correspond à l'illusion finale, lorsque le spectateur, emmené dans un traquenard par le magicien, ne peut discerner le subterfuge et alors réalité et fantasmes s'emmêlent pour laisser place à l'ivresse de s'être laissé berner. Voilà ce dont il est réellement question.
Pour construire son tour, Nolan créé un univers et y incorpore des personnages qu'il va s'amuser à manipuler comme à son habitude. Et si l'on sait que les deux sont magiciens et donc menteurs de première catégorie, on va se prendre d'affection pour chacun d'entre eux tour à tour en rentrant en complète immersion avec leurs rêves, leurs désirs, leurs défauts, leurs vies toutes entières. L'un (Christian Bale) est obsédé par la magie, vit pour elle et ne cherche rien d'autre qu'à devenir le maître de l'illusion tandis que l'autre (Hugh Jackman) va chercher à venger la mort de sa femme, dont il tient Bale pour responsable. Tout ne sera que tour de passe-passe et le spectateur que l'on est va se laisser berner. D'un bout à l'autre, ce film est donc le parfait tour de magie puisqu'il dissémine des indices dont on ne sait que faire, et ce parce qu'on ne regarde pas au bon endroit.
La réalisation est pourtant très classique dans sa structure, on n'a pas d'effets de mise en scène particulièrement novateur et c'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles le réalisateur obtient facilement la confiance de toute personne qui visionne le film : on ne s'attend à rien d'autre qu'un divertissement sans grande envergure, sympathique mais sans grand enjeu. De même pour les acteurs choisis : Hugh Jackman et Scarlett Johanssen d'un côté pour le côté glamour, surtout à l'époque où le premier est dans son rôle de Wolverine jusqu'au bout des doigts et de l'autre le duo traditionnel, les amis que sont Christian Bale et Michael Caine. Leur interprétation est réussie et parfaitement maîtrisée, ils se glissent parfaitement dans la peau de leurs personnages respectifs et ont très bien compris l'intention de départ de créer l'illusion.
D'ailleurs, on peut très bien comprendre qu'il y a un message d'amour au cinéma : qu'est-ce que le septième art sinon que l'illusion de la réalité à travers moult trucages ? Le Prestige n'est-il autre chose qu'une définition tout ce qu'il y a de plus basique de ce que nous adorons tous ? Si Chritopher Nolan aime tromper, il y arrive ici à la perfection ou presque et montre par la même occasion que cinéma et magie ne font qu'un : on y retourne parce qu'on aime ça, on veut y croire, on veut voyager et goûter à la surprise réservée, quelle qu'elle soit, de manière toujours différente.
Finalement, si on n'atteint pas le 10 ici, c'est peut-être parce qu'à trop poser les choses, il en ressort une ou deux petites (et je pèse mes mots) longueurs qu'on aurait préféré éviter. Longueurs qu'on ne retrouvera pas dans The Dark Knight, qui reste à ce jour son meilleur film. Un 9/10 on ne peut plus mérité.