Michiyo (Setsuko Hara) est une femme encore relativement jeune, mariée à Hatsunosuké (Ken Uehara), un homme qui travaille dans une banque. Très occupé Hatsunosuké considère sa femme comme l’épouse traditionnelle devant s’occuper des tâches ménagères, malgré des moyens financiers limités. Pour lui, c’est naturel de lire le journal pendant les repas chez eux, tandis que Michiyo s’affaire. Celle-ci supporte de plus en plus mal sa condition de femme.


Cette situation va évoluer quand Satoko (Yukoko Shimazaki), la jeune nièce du mari arrive chez eux à l’improviste. Satoko a décidé sur un coup de tête de quitter sa famille à Tokyo pour fuir un futur mariage arrangé. Elle arrive à Osaka sans savoir quoi faire d’autre que demander l’hospitalité à son oncle. Sous le charme de la coquette et mignonne Satoko, Hatsunosuké se met en quatre pour la distraire, allant jusqu’à lui faire faire une visite touristique de la région lors d’un voyage organisé en bus.


Satoko est charmée et Michiyo le sent, au point d’éprouver de la jalousie et de se poser des questions sur son avenir conjugal. Les circonstances vont inciter Michiyo à retourner à Tokyo pour retrouver ses parents et sa jeune sœur. La séparation d’avec son mari finira par lui faire comprendre qu’elle ne veut pas couper les ponts.


Mikio Naruse adapte ici un roman écrit par une femme. Cela se sent dès le début, puisque la voix off qui s’exprime est celle de Michiyo qui évoque déjà ce qu’elle déplore dans sa condition de femme. Les revendications féminines sont donc bien présentes. Pourtant, la conclusion ira plutôt vers une sorte de statu-quo, symbolisé par le retour de Michiyo à Osaka en tenue traditionnelle, alors qu’elle était en tenue moderne dans la première partie du film.


Naruse filme calmement. Peu d’éclats dans son film malgré une situation tendue. Pour autant, il ne se contente pas de plans fixes en intérieurs. La parenté avec Ozu est manifeste lorsqu’il filme au ras du tatamis, mais le réalisateur se démarque de cette influence en usant du travelling quand il en éprouve le besoin. Le casting soigné permet la mise en valeur de chaque personnage. Le cinéaste fait preuve d’une grande tendresse vis-à-vis de ses personnages et en profite pour les montrer dans leurs gestes de la vie quotidienne. Des situations qui se répètent apportent discrètement des informations sur la vie au Japon à l’époque. Naruse réussit des cadrages de qualité qui sont au service de son histoire derrière laquelle le réalisateur s’efface. Une modestie qui est ici tout à son honneur. Ni Ozu ni Kurosawa ni Mizoguchi, Naruse fait du Naruse, soit un cinéma intimiste ancré dans son époque (1951) en faisant sentir que les traumatismes liés à la guerre ne sont pas oubliés. Devant sa caméra chaque personnage existe avec son physique, ses qualités et défauts, ses doutes et aspirations. Il montre aussi les relations qui existent entre ces différents personnages. Il fait ainsi sentir les velléités d’indépendance de Michiyo lors d’une séquence où elle retrouve ses amies lors d’un repas entre femmes, justifiant le titre du film.


Sans être un chef d’œuvre Meshi (titre original) s'avère représentatif de l’univers de son réalisateur et mérite d’être vu.


Electron
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le 4 avr. 2024

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