Dans ce film simplement intitulé Le Repas, Naruse nous convie à un univers des plus quotidiens, banal même, pourrait-on dire.
Début des années 1950, un couple marié depuis 5 ans vit modestement à Osaka, lui est agent de change, elle femme au foyer.
Leur vie se passe, chaque jour semblable à l'autre :
" hier, aujourd'hui et demain, je vis les mêmes matins et les mêmes soirs 365 jours par an, de la cuisine au salon"
C'est Michiyo en voix off qui s'exprime ainsi.
Elle prépare les repas, il lit son journal et attend qu'elle le serve : cette monotonie ronge leur couple pourtant marié par amour et le fragilise.
Son besoin d'affection ? Elle la reporte sur le chat.
Le détonateur va être l'arrivée de la jeune nièce de Hatsunoke : 20 ans, jolie, uniquement préoccupée de sa petite personne et qui n'hésite pas à flirter en fausse ingénue avec son oncle, lequel bien sûr n'est pas insensible à cette bouffée d'air frais et de nouveauté.
Et c'est le moment que choisit Michiyo, un peu jalouse, pour partir quelques jours dans sa famille à Tokyo et faire le point.
Mais dans le train qui les ramène à Osaka, la jeune femme, regardant son époux dormir, s'interroge:
"le bonheur pour une épouse, n'est-ce pas finalement de marcher avec son mari, côte à côte dans la vie? C'est peut-être cela le vrai bonheur."
Dans ce film simple en apparence Naruse fait le constat pessimiste et amer de la condition de la femme japonaise mais aussi d'un bonheur linéaire qui n'existe pas:
il faut rester humble et savoir accepter ce que la vie nous donne au quotidien.
L'actrice Setsuko Ara est magnifique dans une interprétation où tout passe par son visage et son sourire, aussi éloquents que les rares paroles qu'elle prononce.
Ce fut ma première incursion dans l'univers de Naruse : un film très représentatif de son art, sobre et beau.