Cela faisait un petit moment que je n'avais pas regardé un vieux film français en N&B, et j'en ai pris conscience à ma jubilation lors des deux premières scènes : la bonhomie fataliste de Jean Brochard face à l'existence, puis surtout la diction irréprochable de Michel Simon, impérial en metteur en scène impitoyable lors d'une répétition avec ses deux principaux comédiens.
Hélas, cette subite allégresse n'a pas duré bien longtemps, car "Le rideau rouge" n'a rien d'un grand classique des années 50 : il s'agit plus modestement d'un petit divertissement sympathique, vaguement policier, sur une tonalité mêlant drame sentimental et comédie.
Le postulat du réalisateur André Barsacq (qui officiait habituellement au théâtre) consiste à mettre en parallèle une enquête policière et une représentation théâtrale de "Macbeth", en respectant les trois unités de lieu, de temps et d'action.
Dans le même temps, on assiste à une mise en abîme de la pièce de Shakespeare, puisque les protagonistes de la troupe se retrouvent plus ou moins dans la posture des héros de la pièce.
Un procédé amusant et parfois pertinent, mais aussi très artificiel et peu judicieux sur le plan du suspense, puisqu'on sait grosso modo dès le départ ce qui va arriver. J'imagine en outre que les bons connaisseurs de "Macbeth" ont pu s'ennuyer devant les explications de texte parfois poussives destinées aux profanes.
Pour ma part, j'aurai passé un moment plutôt agréable devant "Le rideau rouge", grâce notamment aux dialogues enlevés signés Jean Anouilh, à la qualité de la distribution (Pierre Brasseur, Noël Roquevert, Monelle Valentin…), et à une durée assez brève pour éviter l'ennui.