J'ai accueilli l'annonce d'un "nouveau" Roi Lion avec l'enthousiasme d'un patient en salle d'attente avant l'extraction de ses dents de sagesse. Il faut me comprendre : le réalisateur Jon Favreau sortait déjà d'un remake du Livre de la Jungle insipide, que la prouesse photoréaliste rendait incroyablement artificiel. Sans parler de la lassitude à voir une mécanique industrielle gober les classiques de la firme pour les recracher lisses et sans poésie.
Mais comme le Dumbo de Tim Burton parvenait à s'extirper de cette logique, pourquoi ne pas accorder au Roi Lion 2019 le bénéfice du doute? Sage décision mais je m'en mords les doigts.
D'aucuns diraient qu'offrir une nouvelle itération permet à ces histoires de passer de génération en génération. Hélas, c'est un argument qui ne tient tout simplement pas face à la réalité. Le livre de la jungle, la Belle et la bête ou Le Roi lion sont des Disney importants parce que l'original est passé d'une génération à une autre par la simple transmission culturelle. Par les diffusions télé, par les VHS, DVD et Blu-Ray. Ou par les reprises au cinéma, une pratique courante il y a quelques décennies qui avait au moins le mérite de servir ce but.
Hors aujourd'hui, la logique mercantile pousse l'hypocrisie très loin en se cachant derrière le prétexte technologique. Il ne s'agit plus seulement de faire découvrir le film, mais de pousser les fans à payer aussi la place sous prétexte que ce ne sera pas la même chose vu que c'est refait en images de synthèse. Chouette comme argument de vente. Ce sera d'ailleurs le seul, puisqu'à aucun moment le film ne fait autre chose que recopier péniblement son ainé. Ce qui rend la vision de ce Roi Lion d'autant plus désagréable. Oui, le photoréalisme du film est saisissant. Toutefois, il se paye au prix fort d'une absence criante d'émotions. Les tons colorés et lyriques laissent place à une fadeur et un manque d'incarnation que même certains plans majestueux (tous repris de l'original, évidemment) ne parviennent pas à faire oublier. Et le pire, c'est que tout est du même acabit.
Jon Favreau n'essaie même pas faire semblant, et fait une copie plan par plan de l'original, comme pour confirmer sa volonté de ne surtout pas tenter quoi que ce soit au niveau narratif. Une fainéantise révoltante, qui n'a d'égal que le manque d'entrain à l'œuvre pour les chansons (reprises elle-aussi en intégralité, l'énergie en moins) et la bande originale. Avec une indifférence à peine voilée, Hans Zimmer ressert les mêmes compositions qu'en 1994. Les musiques sont belles, malheureusement on les connait depuis 25 ans.
Je ne vois pas quoi ajouter d'autre, tant tout semble sur la même ligne. Prévisible, cynique et sans aucun intérêt. Je suis encore troublé par la propension à lancer ce type de projet qui réussit la prouesse de dévitaliser les originaux de leur puissance. Je mets un bon point pour le travail (dément) du département des effets visuels. Tout le reste me laisse froid.
Vous avez aimé le Roi Lion (l'original)? Restez-en là. Je ne doute pas que l'Histoire du Cinéma en fasse de même. Et si vous avez des enfants, faîtes leur une fleur et montrez leur le film de 1994 si vous voulez qu'il continue à traverser les époques.