Le ruban blanc est un film assez déstabilisant quoique logique si l’on connaît bien Haneke et ses films, souvent synonymes d’invitations à se questionner sur le Mal avec une majuscule, en tant qu’instinct primal et ancré, et surtout sur ses origines.
Le ruban blanc a pour idée principale de démontrer l’auto-alimentation de ce Mal, en choisissant pour décor un village pieux allemand du début du XXe siècle, théâtre de perversions et de cruautés infligées en son sein, par les figures dominantes de ce microcosme (mais pas que).
Incestes, châtiments corporels infligés aux enfants et dégradations psychologiques se succèdent dans ce lieu qui pourrait être si paisible. Il semble qu’Haneke est ici arrivé au plus beau de ce qu’il pouvait offrir en terme de mise en scène. Seuls Tarkovsky, ou Kubrick dans Barry Lyndon sont parvenus à créer des plans d’une composition aussi éthérée et soignée.
La disposition des personnages, les intérieurs d’époque, les scènes de moissons, ou l’idylle naissance entre les deux seuls personnages dénués de vice du métrage ; tout est prétexte à une beauté sans limite.
Beauté qui contraste de la plus belle de manière avec la douleur du récit, qui s’insuffle dans chaque interaction sociale.
Comme dans Dogville de son contemporain Lars Von Trier, Haneke pointe du doigt la communauté dans ce qu’elle a de plus répugnant ; tantôt destructrice envers les plus faibles (l’handicapé érigé en martyr), tantôt fâcheusement encline à taire l’atroce pour ne pas faire de vagues.
Et le village de continuer son sombre manège, prêt à s’unir hypocritement pour affronter la guerre, Mal extérieur qu’il identifie, sans penser à regarder celui par lequel il est rongé.