"Le Seigneur des Anneaux : La Guerre de Rohirrim" explore un nouveau récit de Tolkien en se plongeant dans les racines tragiques et héroïques du Rohan. Sous la direction de Kenji Kamiyama, le film d’animation nous transporte plusieurs siècles avant la trilogie principale, plongeant dans le règne du légendaire Helm Hammerhand et dévoilant les origines de la forteresse du Gouffre de Helm.

L’animation, médium trop souvent perçu comme secondaire, trouve ici son souffle épique. La direction artistique, hommage avoué à Ralph Bakshi et son adaptation de 1978, excelle particulièrement dans la représentation des personnages et des créatures. Pourtant, cette audace stylistique ne saurait éviter les comparaisons avec les œuvres live-action où certains y verront une stratégie commerciale de Warner Bros., cherchant à séduire de nouveaux marchés (notamment chinois) et à capitaliser sur la nostalgie des fans tout en séduisant une jeune génération friande d’univers visuellement spectaculaires, à l’image des créations de Ghibli ou d’Arcane.

Le récit, fidèle à l’esprit de Tolkien, porte en lui quelques maux. Certains enjeux narratifs peuvent paraître plus universels et moins personnels que les récits des Hobbits, ce qui peut empêcher d'être en total empathie avec la galerie de personnages. Cependant la Guerre de Rohirrim renoue avec la violence archaïque et la fragilité des peuples face à des forces dépassant leur entendement. La dualité entre tradition légendaire et modernité narrative enrichit, à mon sens, l’expérience, introduisant de nouveaux personnages et offrant des perspectives inédites.

Là où le film s’éloigne de l’œuvre de Tolkien, c’est dans son traitement des personnages féminins. Sans forcer un discours contemporain, le récit inclut des figures féminines fortes, questionnant leur volonté d'être dans un monde dominé par des hommes machistes. Loin d’être une injonction moderne parachutée, cette nuance apporte une profondeur sans jamais dénaturer l’univers original.

Si la bande-son recycle avec nostalgie les compositions grandioses de La Communauté de l’Anneau, la musique originale peine, quant à elle, à marquer. Générique et oubliable, elle laisse une impression de vide là où elle aurait pu sublimer l’immersion. Ce choix illustre une dépendance au matériau d’origine qui, bien qu’émouvante pour les amateurs, freine l’émancipation de cette œuvre animée.

Certains moments s’abandonnent à un fan-service appuyé, multipliant, sur la toute fin, les clins d’œil. Ces ajouts, bien que nostalgiques, diluent l’impact et rappellent trop ouvertement que ce film s’inscrit dans une stratégie commerciale.

"La Guerre de Rohirrim" est donc une œuvre hybride, oscillant entre ambition et hommage sincère et opportunisme évident. Si son ambition esthétique et narrative n’est pas à négliger, elle se heurte aux attentes d’un public partagé entre fidélité à l’héritage de Tolkien et désir de nouveauté. Malgré ses défauts, le film parvient à étendre l’univers de la Terre du Milieu tout en restituant les codes mêmes de son récit légendaire.

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