Jackson aurait pu tomber dans un piège facile (Besson, les frères Washiowski et même Jackson lui-même ont fait cette erreur finalement difficile à contourner), c'est la gaffe de se servir du deuxième volet comme une simple transition pour le grand final, comme un bouquet de promesses tellement grandioses qu'elles sont impossibles à tenir ("le retour du roi" est une exception). Mais ce serait mal connaitre la compétence du bonhomme. "Les deux tours" (titre aussi complet que ceux des deux autres, au passage, vraiment excellents) est un film à part entière, une grande fresque dantesque. Et même si je préfère légèrement "la communauté de l'anneau", il n'empêche que c'est toujours un grand voyage à savourer !
Faudrait vraiment ne rien connaitre au cinéma, ou en tout cas à la condition du réalisateur, pour oser démentir la qualité de la réalisation. Il va encore plus loin que le premier volet, avec notamment l'arrivée de Gollum. Sa scène où il se libère (temporairement) de sa schizophrénie est d'anthologie. Ah, Gollum, putain.... un de mes méchants préférés, et un des meilleurs personnages de tous les temps. Tellement de frasques impossibles à guérir, tellement d'humanité (et oui !) montré comme un miroir sale, il est purement fascinant. Andy Serkis a un vrai talent physique, et sa prestation est à saluer tout autant que s'il l'avait incarné en live. Les décors, toujours majestueux (les paysages tournés en hélicos, que des diaporamas inoubliables, surtout avec la musique impeccable d' Howard Shore), sont de parfaits terrains de jeux pour une histoire toujours aussi passionnante, d'ailleurs l'histoire d'amour d'Aragorn devient intéressant dans ce volet-là. Même si c'est encore plus compliqué qu'avant. Même si la scène de la bataille finale est un peu trop longue à mon goût. Même si la communauté pleure la mort de deux hobbits alors qu'ils passaient leur chemin devant le massacre d'un peuple entier. Même si le langage elfique, au final, ne sert pas à grand chose dans leurs contextes utilisés. Qu'importe, on est face à un grand spectacle unique, et ça on le sait tout de suite.
Mais, les personnages...
Y' en a qui s'améliorent, y' en a qui empirent, et y' en a qui bougent pas.
Celui qui s'améliore, c'est Gimli (détail amusant: sur un des plans en altitude, à sa première apparition, vous pouvez le voir perdre sa chaussure en courant !). Mais ce sont surtout deux nouveaux personnages que je trouve magnifiques: Théoden et Grima. Le roi et le traitre. Interprétés magnifiquement, ils incarnent à eux deux des faces à la fois opposées et complémentaires de la race humaine. Les Heltes sont également une invention géniale, et montrés comme il faut.
Ceux qui empirent, ce sont Aaragorn (mais lui, j'ai jamais pu le piffer... et là c'est emmerdant, parce qu'on le voit beaucoup plus...), Legolas (là, y' a plus de mi-temps, il en fait tout le temps des caisses, tel que le ciel est rouge... beaucoup de sang ont été coulé cette nuit à l'aube !) et Sam. Qui nous montre à quoi ressemble une jalousie amoureuse... non, sérieusement, d'où vient cette méfiance improbable pour Gollum à votre avis ? Il s'est mis à le détester vraiment qu'au moment où Frodon a pris pitié de lui, et il n'a concrètement aucun argument pour réellement le haïr au début ! D'ailleurs, comme je l'ai dit plus haut, une utopique rédemption a pu être suggérée pour Gollum grâce à la bonté de Frodon... donc voilà, il est vraiment bizarre, le p'tit Sam.
Et ceux qui bougent pas, comme Gandalf (toujours énorme, même si je me demande à chaque fois où il va quand il s'absente, alors que plus urgent y' a pas), Saroumane, Merry et Pippin (bon, là, ils font déjà un peu moins bouffons) et Faramir.
"Les deux tours", au final, évoque bel et bien les relations en duo qui se nouent dans ce film, pour enfin aboutir à la Grande Guerre. Une belle réflexion sur le rapport à l'autre, et ce qui en découle. C'est pourquoi une plus grande importance accordée au périple de Frodon m'aurait plu... A voir à plusieurs, cela va sans dire.