Antonio Lopez Garcia aime bien son arbuste qu'il a planté voilà quatre ans déjà... Il profite d'un automne bien chargé de fruits pour peindre celui-ci avec sa rigueur coutumière...
Moi, deux heures vingt sur un type qui peint un arbre fruitier, aussi bizarre que ça puisse paraître, ça me parle, ça m'intéresse même, enfin, à condition de me donner à côté de quoi apaiser mes sens, sinon, c'est vite lassant...
Je suis un homme simple et facile à acheter, moi, si on me donne du contemplatif, je demande juste le travail minimum en cadrage et photographie pour faire passer superbement la pilule, sinon, je m'emmerde assez vite, j'avoue...
Ici, c'est peu de dire que le compte n'y est pas, des cadrages de téléfilm, une photographie espagnole si caractéristique et si désagréable (le même Victor Erice avait pourtant été l'auteur d'un des rares contre-exemples du pays avec son Esprit de la ruche vingt ans plus tôt, un effort pas toujours convainquant d'ailleurs, mais louable), une caméra qui se rappelle désagréablement à votre souvenir à coups de mouvements maladroits à chaque fois qu'elle sort du plan fixe, des acteurs désastreux, même si presque inexistants, enfin, pas grand chose à sauver de ce côté là...
Pour le reste, il y a plein de petits détails de construction très intéressants vu que le peintre fabrique lui-même ses toiles et que sa technique particulière nécessite divers artifices de mise en scène.
Bon, après, le problème, c'est que passée la première heure, on s'en fiche un peu, le film devient même inutilement explicatif, et vu le propos artistique simpliste qu'il y a derrière, ce n'étais pas forcément une bonne idée... Le travail créatif en vient à manquer à la fois de simplicité et de profondeur, ce qui n'est pas si facile, et on n'est pas aidé par un Antonio Lopes transparent et néanmoins antipathique du début à la fin.
Je n'ai pas été autrement convaincu par les petites touches urbaines d'un Madrid insipide ou par toutes les tentatives inutiles de lien vers un extérieur radiophonique quelconque.
Alors, entre deux ou trois plans réussis de soleil, on attend que ça se passe, on fait une pause pour cuisiner le couscous du soir, on s'arrête déjeuner merveilleusement devant un Macherot, on sort même un ou deux verres de vin pour se redonner du courage, mais rien n'y fait...
En fait, à un moment, le fichu arbre me paraissait tellement plus agréable que son imitateur que j'en devenais triste de le voir marqué de la sorte à la peinture banche, de le voir privé injustement des pluies d'orage aussi... Et là je me dis que parvenir à m'intéresser aussi longtemps à un con de cognassier c'est presque déjà une performance, même si ça ne sauve pas tout et que je me demande encore ce que j'ai bien fait pour mériter ça...