-Les hommes trouvent toujours des raisons d'éviter de vivre en paix. Cette vallée, par exemple. On pourrait penser qu'il n'y a aucune raison d'y répandre du sang, pas vrai ?
-Ce n'est pas ma guerre.
-J'ai observé que chez l'homme, l'appétit vient en mangeant. Et il n'y a rien de pire que la faim de terre. Ça bouffe tout et tout le monde.
Le Souffle de la violence est dans un premier temps un western classique adoptant dans un second temps une conduite étonnante, centré sur la confrontation entre éleveurs pour la prise de domaine. Réalisé par Rudolph Maté (Terre sans pardon, Horizons lointains, Les Années sauvages) d'après le roman Smoky Valley de Donald Hamilton (que je n'ai pas lu), celui-ci propose un film loin de toute naïveté, étonnamment violent dans sa forme et son fond pour un western des années 50 (pas encore influencé par le western Italien de Sergio Leone arrivant au milieu des années 1960), qui prend tout son sens avec son titre.
Malgré son petit budget Le Souffle de la violence présente une mise en scène étonnamment bonne, proposant des paysages de montagnes grandioses. Les décors choisis sont spectaculaires présentant des plans vastes et divers d'Alabama Hill, Californie, ou encore d'Arizona. Une photographie lumineuse et colorée de W. Howard Greene et de Burnett Guffey, qui n'est clairement pas étrangère à la réussite de son cadre, avec de profond champ dans des scènes pas une fois tournées en studio. Les divers affrontements au colt ne manquent pas de réalisme et de réussite, avec des actions efficaces et des scènes de poursuite de bétail divertissantes même si loin d'être incroyables.
Malgré le manque de richesse dans le scénario, l'intrigue réussit à maintenir l'intérêt par un travail psychologique sur les liaisons entre les différents personnages. Un subtil travail autour des regards. Ajoutons à cela des séquences relativement marquantes comme avec la séquence de torture au fouet d'un cowboy, celle d'un shérif abattu dans le dos sans la moindre pitié, la trahison pour le pouvoir d'une épouse, et un duel final au colt saisissant. La partition musicale de Max Steiner propose une ambiance classique dans la plus pure lignée des aventures du far-west, autant amusant que limité.
Le casting est de bonne facture, proposant une performance toujours au top de Glenn Ford (La Poursuite des tuniques bleues, Les Desparados, L'Homme de nulle part) qui en tant que John Parrish vétéran désuet et expérimenté de la guerre de Sécession, ne compte pas se laisser faire dépouiller de ses terres contre, Edward G. Robinson (Key Largo, Soleil vert, La Rue rouge) alias Lew Wilkison, propriétaire estropié du plus grand domaine de la région avec sa femme Martha, incarnée avec diabolisme par Barbara Stanwyck (Assurance sur la mort, Un coeur pris au piège, L'Emprise du crime). Diabolique de bout en bout, tout droit sortie d'un film noir, elle est clairement l'antagoniste principale de l'ombre, menant par le bout du nez son monde.
Brian Keith (Nevada Smith, New Mexico, Rancho Bravo) en tant que Cole Wilkison frère du patron, incarne la partie musclée dans la confrontation contre Glenn Ford. Il faut reconnaitre qu'il possède vraiment une tête de vicelard à qui il ne faut surtout pas faire confiance. Les trois comédiennes Dianne Foster, May Whynn et Lita Milan apportent quelques surprises en incarnant des femmes de bonne famille qui au premier abord laissent voir des femmes dociles mais qui s'avèrent être égoïstes, manipulatrices... malheureusement elles sont un peu sacrifiées au récit. Je terminerai par Richard Jaeckel (Le Clan des irréductibles, Les Douze Salopards, Iwo Jima), tueur à gages pour le compte des Wilkinson qui est génial dans ce rôle de pourri tortureur, qui sera à l'origine d'un bon duel au colt dans le bar contre Glenn Ford.
CONCLUSION :
Le Souffle de la violence est un western au-dessus de la moyenne qui montre des faiblesses en n'allant pas suffisamment au bout des choses, s'empêchant de relâcher une bonne fois pour toutes le frein à main (ce qui est frustrant), malgré son côté brutal déjà étonnant pour son époque de réalisation. En ressort un film divertissant qui ne marquera pas le genre, mais permettra tout de même de passer un bon moment grace à des scènes marquantes, et un jeu psychologique intéressant entre certains protagonistes.
Glenn Ford dans un rôle plus musclé et impitoyable que dans La Poursuite des tuniques bleues c'est vraiment très bon, ne manquait plus que le réalisateur adéquat pour mettre en place une oeuvre à la hauteur du comédien.