8ème western de Sergio Corbucci, Le Spécialiste est une coproduction franco-italo-allemande, réalisée en 1969. Elle narre l'histoire d'un mystérieux homme solitaire, sorte de légende de la gâchette aux quatre coins de l'Ouest sauvage, qui revient dans sa petite ville natale, perdue au fin fond du Nevada, afin de venger la mort de son frère, visiblement assassiné par les autochtones pour une sombre histoire d'argent dévalisé dans une banque.
Ersatz des premiers westerns de Leone, Le Spécialiste, pensé avant tout pour le marché français, met en avant la vedette de la chanson populaire de l'époque, j'ai nommé Johnny Hallyday (orthographié Halliday sur l'affiche originale et le générique). Inconnu en Italie, le chanteur démontre aisément ici qu'il a encore beaucoup à travailler ses performances en tant qu'acteur et se ridiculise un tant soit peu en essayant d'imiter le mutisme de Clint Eastwood dans le rôle de l'Homme sans Nom. Hallyday sera d'ailleurs plus à l'aise et nettement mieux mis en valeur l'année suivante sous la direction de Robert Hossein dans le fort intéressant Point De Chute en jouant un voyou au cœur tendre. Ici, il reste simplement figé et catastrophique, tentant pourtant d'incarner son personnage au mieux tout en débitant des répliques creuses, ce qui n'aide pas non-plus à apprécier le long-métrage. Françoise Fabian, en manipulatrice perverse, s'en sort largement mieux de par la subtilité de son jeu.
Le Spécialiste, faisant suite au prodigieux et crépusculaire Le Grand Silence du même Corbucci, propose néanmoins une réalisation rigoureuse tandis que la direction photo magnifie les paysages de Cortina d'Ampezzo, petite ville italienne de 5000 habitants ayant accueilli les Jeux Olympiques d'hiver en 1956.
Et bien qu'il ait indéniablement inspiré Eastwood pour son fameux High Plains Drifter, ce 8ème western de Corbucci reste une œuvre mineure, parfois transcendée par des scènes hallucinantes comme celle où tous les habitants de la ville se voient humiliés par des despérados mexicains qui les forcent à ramper nus. Une scène qui m'a personnellement ramenée au Salò de Pasolini réalisé 6 ans plus tard.