Xavier Legrand s'attendait à ce que Le Successeur fasse moins l'unanimité que Jusqu'à la garde et les réactions mitigées devant son second film lui donnent raison. Il n'empêche que malgré ses imperfections, l'apparente absurdité de certaines réactions de son héros, par exemple, ou encore des ellipses parfois peu compréhensibles, l'envie de défendre Le Successeur est forte, de par la volonté qu'a le réalisateur de pousser son histoire très loin, aux confins de l'horreur, comme pour tester notre acceptation de vivre dans l'inconfort pendant une grande partie de la projection. Peut-être que tout n'est pas crédible, effectivement, mais nous sommes au cinéma, que Diable, et pourquoi ne pas accepter les quelques possibles incohérences, sur le compte d'une fiction qui entend se projeter dans des territoires où la panique se substitue à la raison et, surtout, à la morale ? Dans une intrigue qui emmêle les fils de la filiation, de manière tellement physique et viscérale, il y a une audace et une prise de risque très respectables, un peu comme dans Les chambres rouges, d'ailleurs. Le casting québécois du film est lui impeccable de bout en bout, à commencer par Marc-André Grondin, bien entendu, convaincant, et le toujours excellent Yves Jacques qui réussit la prouesse de camper un gentil aux allures très inquiétantes.