"Deceiver" est clairement un film de petit malin, tentant visiblement de surfer sur le succès d'"Usual suspect", sorti deux ans plus tôt (les distributeurs français prenant d'ailleurs soin de choisir un titre français voisin).
Sur le principe cela ne me pose pas de problème, mais concrètement le film de Jonas et Joshua Pate ne peut pas compter sur la riche matière scénaristique imaginée par Christopher McQuarrie, son intrigue se limitant à une poignée de personnages et de situations, insuffisantes pour brouiller les pistes à la manière du petit chef d'œuvre de Bryan Singer.
De fait, on se retrouve face à un quasi huis clos, qui débute par une scène de détecteur de mensonges à trois personnages, d'une durée d'une demi-heure. Et pour le coup, ce n'est pas la faute du film, mais je pensais regarder un polar classique, et j'ai été frustré d'emblée par cet aspect huis clos, ce qui ne m'a pas mis dans les meilleures dispositions d'esprit à l'égard de "Deceiver".
De même, j'ai regardé une version française (seule disponible en streaming), sans avoir perçu que la nature du film rendait la VO incontournable, pour profiter à plein des prestations d'acteurs qui sont au cœur du récit.
En particulier celle de Tim Roth, le personnage central, gosse de riche désœuvré et épileptique qui se retrouve soupçonné du meurtre d'une prostituée. Le comédien anglais s'en donne à cœur joie pour proposer une performance majuscule, flirtant en permanence avec le cabotinage, bien secondé par Chris Penn en flic pas futé et par Michael Rooker, son supérieur expérimenté mais en proie à des tourments intérieurs.
Le casting féminin n'est pas en reste, puisqu'on croise aussi Renee Zellweger, Rosanna Arquette et Ellen Burstyn dans des rôles secondaires.
Ce que je reproche à "Deceiver", c'est son scénario plus prévisible qu'il ne s'en donne l'air, et les facilités d'écriture qui permettent aux réalisateurs-scénaristes de retomber sur leurs pieds, notamment lors du dénouement. On déplore en outre certaines longueurs et quelques effets visuels datés, sans parler de la représentation outrancière des crises d'épilepsie.
Ceci posé, je n'exclue pas que l'unique long-métrage des frères Pate (qui travaillent désormais pour la télévision) ait pu me laisser une meilleure impression dans un autre contexte, car "Deceiver" n'est pas dénué de maîtrise, et fait preuve d'une originalité bienvenue.