Le Tambour : battons cadence
Si vous avez du temps, un jour, et même si vous n’en avez pas, regardez le Tambour. Véritable fresque historique à sa manière, il fait s’entrecroiser des scènes que nous n’avons pas forcément envie de voir, alternant histoire et scénario. Pour commencer, un petit tour d’horizon : je ne l’ai pas précisé auparavant, mais ce Tambour est de Schlöndorf. Réalisateur allemand reconnu, il est notamment connu pour être arrivé ex aequo avec le Apocalypse Now de Coppola. Je n’ai pas vu le dernier alors ne chercherai pas la comparaison. Ajoutons qu’il s’agit également d’un roman de Günter Grass lui-même.
N’empêche que le Tambour s’inscrit dans une lignée de film qui cherche à expliquer, revivre, réfléchir sur la Seconde Guerre mondial. Il ne cache pas ses cicatrices à travers des nanars à l’eau de rose – et comme pour Hollywood des comédies chantantes. Car, rappelons-le, c’est en plein négationnisme qu’Hollywood et l’Amérique développèrent les comédies musicales, comme dans un désir un peu absurde d’aller à l’encontre de Freud et ses idées de crise si l’on en parle pas. Mais ce n’est pas notre sujet : ce qui importe, c’est que ce Tambour, il ne parle pas forcément de situations réalistes : au contraire-même, la plupart des scènes que nous verrons dedans ne le sont pas du tout.
Dans une Pologne pauvre, un voleur s’enfuit, trouve une femme, se cache sous ses jupons. Lui fait un enfant. Cette enfant grandit, tombe amoureuse de deux hommes : le premier, son cousin, lequel est plutôt doux et poète. Le deuxième, son mari, lequel est dur mais qu’elle aime tout de même. Ils ont un fils, tous les trois. Tous les trois, parce qu’on ne connaît pas vraiment l’identité du père d’Oskar, même si on la suppose. Un jour, allons qu’il surprend des échanges sensuels entre les adultes, Oskar décide de ne plus grandir. Il se jette de l’escalier de la cave et…trois ans plus tard, le bambin fait toujours la même taille. A sa main, un tambour dont il ne voudra pas se séparer pendant tout le long de la série. Oskar n’est pas qu’un nain, pas qu’un enfant. Il est également un symbole. Tout comme l’affiche-même du film est symbolique, venant rappeler l’affrontement entre plusieurs groupes de couleurs : jaune, rouge, noir, symbolisant le drapeau de l’Allemagne, mélangé aux couleurs blanche, rouge et noir, évoquant, elle, un nazisme envahissant et dominant.
Les expressions d’horreur du garçon, ses cris nous soulèvent le cœur. Le malaise dégagé de la mère face à cette fameuse scène des anguilles l’est aussi par le spectateur.
La scène qui, elle, nous fédèrera tous, c’est celle de l’accueil d’un dirigeant nazi. Où le jeune Oskar, de par les rythmes de son Tambour, fera jouer à l’orchestre entier l’Hymne à la joie et où, tout le monde, même le petit peuple, se mettra à danser la valse. Il n’est pas facile de résumer le Tambour. Parce qu’il est trop dense pour parvenir à le faire, il contient tellement d’éléments, tellement de références qu’il serait préférable de le voir directement. Il est intéressant de voir que Le Tambour, malgré la filmographie très active de ce réalisateur, est son film le plus reconnu.
Le Tambour n’est pas un film qui choque comme les films de nos jours. Ni même comme The Shining, maîtrisant l’horreur, la musique et le suspens comme l’araignée le fait de sa toile. Non. Loin de là. Ce n’est pas un film d’horreur, c’est plutôt une histoire se situant entre tous les genres. Parce que ce tambour-là, celui d’Oskar, est unique. De même que ce héros est également une figure d’anti-héros et que son comportement nous gêne, nous horripile parfois. Oskar est loin d’être un ange, il dégoûte le spectateur, et d’ailleurs, dénature complètement le mythe de Peter Pan. Regardez-le, vraiment.
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