Le Temps du Châtiment est la première rencontre entre John Frankenheimer et Burt Lancaster qui se retrouveront 5 fois au total dans la décennie 1960, ce dernier se retrouvant dans la peau d'un assistant-procureur chargé d'une enquête sur un meurtre mêlant deux bandes rivales.
Frankenheimer s'attache à être le plus réaliste possible (reprenant même des personnes jouant leur propre rôle dans ce fait divers), il parcourt les quartiers d'East Harlem pour y montrer la violence, et de manière plus générale, la façon dont celle-ci génère toujours la violence. Au milieu de tout cela, il y a Burt, tout en retenue face à cette histoire qui va aussi lui rappeler des souvenirs, tant à l'acteur qu'au personnage.
Loin de se contenter de juste montrer la violence dans les quartiers, Frankenheimer lorgne vers le film social, et montre une jeunesse perdue, désœuvrée, se réfugiant dans le communautarisme et cherchant surtout à survivre. Sa recherche du réalisme le pousse à faire un film sans concession et cru, axé sur le social donc ainsi que l'enquête, pour découvrir le pourquoi du comment. Il ne cherche pas à être moralisateur mais à montrer et comprendre la jeunesse, ainsi que la justice, Burt Lancaster étant ici son alter-égo dans un type de rôle qu'il maîtrisait déjà avec brio, ferme et dur mais juste.
La photographie en noir et blanc se mêle à merveille avec les thématiques, axant encore plus l'atmosphère sur un aspect de désillusion voire d'impuissance. Frankenheimer gère bien ses personnages, Burt est la vedette mais il n'oublie pas ceux tournant autour, et en particulier les rôles féminins, sa femme et son ancienne petite-amie. Chaque personnage autour de lui pourrait jouer une partie de sa conscience, lui rappelant, (in)directement, le meilleur chemin pour arriver à la vérité.
Il filme nerveusement, presque caméra à l'épaule lors de certaines séquences, arpente les rues avec une bande son jazzy qui sied à merveille aux images. Il alterne avec des moments où il reste sobre, s'attachant à retranscrire l'enquête où il tend parfois vers l'exagération sans en devenir lourd. La scène d'introduction est déjà très tendue, et les dernières, lors du procès, sont plus complexes, tentant de répondre à la question de la préméditation et de la responsabilité d'un crime, et mettant en avant l'aspect politique pouvant jouer dans ce genre de procès.
Le Temps du Châtiment permet à John Frankenheimer de sublimer Burt Lancaster voyant la violence et la désillusion augmenter dans certains quartiers et au sein d'une jeunesse qui n'a plus de repère, il signe une œuvre marquante, plutôt sombre et tentant d'être au plus près de la cruelle réalité.