La première chose que l’on pourrait éventuellement retenir du beau film de François Ozon, c’est la scène du fist. Pas temps pour l’acte en lui-même, mais pour l’ambiance calme et douce de la séquence, pour ce jeu de regards intenses entre Romain et le garçon en train de se faire pénétrer ; jeu de regards qui frappe, qui souffle, angoissant et tendre, dénudé et puissant. Il y a aussi la dernière scène où Romain meurt seul sur une plage qui se déserte au fur et à mesure que le soleil se couche et disparaît, par un jeu de perspective, dans sa bouche et dans son corps malade, avalé et mort. Il y a aussi ce garçon qui va mourir et cette histoire que l’on a tous plus ou moins fantasmé un jour, ce qu'il y aurait de primordial à faire s’il nous restait quelques mois à vivre…
Loin des clichés et d’une émotion de bazar, Ozon cherche l’épure, l’ascèse. Romain règle ses comptes, se renferme, refuse la pitié, n’annonce rien, se travaille de l’intérieur. Avant c’était un garçon suffisant, méprisant avec sa famille et son mec, il deviendra dès lors une espèce de corps martyr qui s’offre aux miséreux (faire un enfant à un couple stérile), cristallisation d’une douleur muette qui se tait, qui se garde, par lâcheté ou par force. La mort est une certitude, acceptée parce que toute proche, parce qu’il n’y a rien d'autre à faire, et parce que la vie se clôt toujours par une fugue, un abandon ailleurs, sous un soleil brûlant ou sur un lit d’hôpital.