J'avoue qu'un bon moment, j'ai été sous le charme. C'est drôle, surprenant, audacieux et même assez beau, à l'image d'une exploitation très originale des décors et d'une esthétique rappelant à plusieurs reprises le cinéma de Jean-Pierre Jeunet, auxquelles s'ajoute une poésie douce et étrange
(ah, ce rêve avec la main dansant sur la table : magnifique!)
qui m'a séduit comme rarement au cinéma ces derniers temps. Malheureusement, un peu à l'instar de son « Mr. Nobody », partant si bien avant de s'égarer dans des considérations fumeuses, Jaco Van Dormael semble perdre la main dans la dernière partie, au point que je ne savais plus du tout où voulait en venir le cinéaste.
Si je comprends et adhère à pratiquement toutes les idées (et Dieu sait s'il y en a!) des deux premiers tiers, j'avoue avoir un peu lâché à l'approche de l'évangile de Martine, le réalisateur semblant alors en pilotage automatique pour terminer son récit coûte que coûte, et tant pis si c'est un peu n'importe quoi. Je le regrette d'autant plus que jusqu'ici, que ce soit les propos sur la religion, la condition humaine, la solitude et quelques visions complètement frappadingues (dont la principale reste sans doute d'avoir imaginé Benoît Poelvoorde pour interpréter un Dieu cruel et tyrannique), le film fonctionnait presque à merveille, ce qui rend la rupture assez brutale.
Reste alors certaines trouvailles étonnantes
(le poisson chantant « La Mer » : irrésistible),
une bande-originale totalement iconoclaste et une perpétuelle volonté d'étonner, de chercher, de créer évidemment plus que louable. Bref, voilà une œuvre totalement à part en cette année 2015, bourrée de qualités devenues tellement rares aujourd'hui que je ne peux que vous conseiller d'y jeter un œil, sans pour autant m'empêcher de rester sur ma faim devant l'impossibilité du réalisateur d'avoir su aller jusqu'au bout de son incroyable démarche.