Le maïtre se lève, il faut tenter de dire au revoir !
De Miyazaki, je n'ai découvert l'univers qu'il y a quelques semaines, ma bonne résolution cinématographique 2014, me mettre au maître japonais de l’animation. Sacré bonne idée dans la mesure où il prend sa retraite avec « Le vent se lève » et qu'en plus celle ci semble être la bonne.
Ici tout se passe autour du rêve, là où tout est permis, sans barrières ni frontières, là où l'imagination est reine, créatrice de toutes choses et libérée de tout entrave. Le rêve de l'aviation, le rêve de voler comme un oiseau et de connaître les plaisirs de la liberté céleste. Et ne nous y trompons pas, il ne s'agit ici que de ce rêve précis et non d'un pamphlet à la gloire de l'aviation militaire japonaise de la seconde guerre mondiale comme certains ont pu l'attaquer. Jiro ne rêve que de conquérir le ciel et à aucun moment de faire de sa création un porteur de mort et de désolation.
Au sein d'un contexte politique précis – on est à l’orée de la seconde guerre mondiale – ce grand rêveur qui se donne les moyens de ses ambitions ne va avoir de cesse d’accroître ses talents dans le but d'enfin créer l'avion qui le fera entrer dans l'histoire tout en faisant rattraper son retard à son pays. Contexte social maintenant puisque ce dit pays est obsédé par ses besoins militaires et n'hésite pas à y consacrer des sommes astronomiques pendant que son peuple vit dans une grande pauvreté. Toutefois, culturellement, il n'est pas dans les coutumes de ces gens de baisser les bras, courageux et travailleurs, être démunis n'est pas une raison de s'apitoyer mais au contraire de continuer à se battre, capable de rebâtir leur capitale en seulement deux années après qu'elle ait été ravagée par un tremblement de terre puis un incendie, parce que le vent se lève, il faut tenter de vivre. Belle image que ce « vent » qui vous pousse sans cesse en avant, sans que vous puissiez le voir, au mieux juste le ressentir, il est là, présent, éternel, invincible.
Mais que serait un Miyazaki sans l'amour ? L'amour portée à un but, à la nature, à un être cher ou ici à une femme. Une jolie histoire d'amour touchante, pleine de grâce, traité avec patience et légèreté bien qu'emprunte de noirceur avec la mort qui rôde sans cesse. Une histoire dans sa conception somme toute banale, déjà-vu mais jamais redondante, ni insipide, encore moins vulgaire. Juste un amour vrai partagé entre deux personnes qui se sont attendues et ont su s'aimer de la manière la plus vraie et la plus forte qui soit, en s'offrant l'un à l'autre sans concessions.
Le film se démarque beaucoup des productions habituelles du maître qui délaisse pas mal de ses thèmes récurrents, à commencer par la touche de magie, de fantastique qui parsème habituellement ses récits, on note également que le héros « miyazakiesque » est plus habituellement de sexe féminin. Toutefois il semble évident que la vision de Jiro, aussi bien que lui même, sont idéalisés tant il apparaît parfait en tout point. Travailleur, talentueux, profondément bon, possédant un goût inné et sans commune mesure du partage et du sacrifice, on retrouve la vision pacifiste de l'artiste mais aussi bien évidemment sa passion de l'aviation, thème omniprésent dans sa filmographie. Avec son père à la tête d'une entreprise en aéronautique, qui a notamment conçu des pièces pour les célèbres « Zero », Miyazaki boucle la boucle de la plus naturelle des manières avec cette biographie du créateur du célèbre chasseur.
Plus mature que ses productions passées, Miyazaki prend aux tripes avec un film au charme envoûtant qui n'a de cesse de célébrer la création sans bornes si cher à son auteur qui aura su, tout au long de sa carrière, réussir tout ses paris et donner vie à des univers riches, mignons, émouvants et engagés.