Miyazaki nous l'avait déjà montré de nombreuses fois auparavant, il sait peindre le vent. Il le dessine, lui donne une rondeur qui n'a pas son pareil, et une profondeur parfois insondable.
Mais dans "Le vent se lève", c'est autre chose; nombreux sont les musiciens à avoir écrit des balades, des odes et autres concertos. Ils sont peu à avoir composé une symphonie qui reprend tout ce qui les a rendu célèbre. Or c'est précisément ce que qu'à fait Miyazaki: il a dessiné son film comme un parachèvement de tout ce qu'il avait progressivement introduit dans nos consciences.
L'eau de "Ponyo sur la falaise" comme le déroulement de l'histoire, oeuvre des hommes contre laquelle on ne peut plus s'opposer. Le feu du "Château ambulant" dans cette guerre que mène les Japonais contre le reste du monde. La terre de "Princesse Mononoké", la dernière ancre rattachée à la vie de tous les jours, dans ce monde qui ne cesse de changer. L'air du "Château dans le ciel", comme un hommage rendu au vent, et à ceux qui ont su voguer dans le bleu du ciel avec leurs avions, ceux qui ont fait l'aviation moderne. Et enfin le vide, présent dans chacun de ses films, personnifié par la relation entre l'ingénieur et sa femme.
C'est un film "élémentaire", au sens ou il reprend toute une oeuvre basée sur la nature, et sa destruction par l'espèce humaine. Un film poétique, beau, infiniment beau même tant le dessin est soigné, propre et sans fioriture, et terriblement humain.
Ici, la dimension mystique s'efface au profit de celle du rêve dont la quête inexorable n'impose qu'un immense dilemme aux protagonistes. Une humanité sourde et muette qui se cachait au fond de l'artiste qu'est Miyazaki, qu'il faisait transparaître dans "Nausicaä" ou "Kiki la petite sorcière": au fond nous sommes tous humains, et c'est à nous qu'il rend hommage dans ce dernier film.
Le dessinateur talentueux tire sa référence avec un chef d'oeuvre digne de ce nom, qui dépose le point final du travail d'une vie. Celle du vent, celle du changement.