Dès le début, on sait que la radio de l'avion ne fonctionne pas. Alors quand l'avion est pris dans une tempête de sable au milieu du Sahara au point d'être obligé de se poser en catastrophe au milieu de nulle part, on devine que ça va être la merde. En plus, les réserves d'eau ne sont pas illimitées et la ressource locale, évidemment, inexistante…
Robert Aldrich réussit un beau huis-clos étouffant de plus de deux heures avec une douzaine de survivants de différents profils et différentes nationalités.
La particularité de ce film qui le rend d'ailleurs très intéressant par rapport à ce qu'on voit habituellement dans le même genre, est la linéarité du récit. On voit, jour après jour, ces différents personnages évoluer, râler, se battre, s'entraider, avec leur regard simplement tourné vers un avenir incertain. Aucun flash-back d'une vie antérieure heureuse ou pas, aucun souvenir (sinon une photo montrée quelques secondes) ne viennent polluer le scénario. Dès le pré-générique, le spectateur est immergé dans ce monde et va suivre les fonctionnements et réactions des personnages en situation. Pas de présentation en règle des personnages mais une caméra très mobile qui passe d'un personnage à l'autre. Peu à peu le spectateur va découvrir le fond de chaque personnage entre l'humaniste, le lâche, le sceptique, le rigolard, le volontaire, le professionnel, le théoricien, le pragmatique.
C'est comme le lead ! Au départ, le leader normal (et officiel) est le pilote. Comme il est moralement effondré par le crash et ses conséquences humaines, c'est logiquement un officier qui reprend le lead pour organiser une expédition vouée à l'échec. Finalement, un ingénieur en aéronautique va, contre l'avis de tous, reprendre le flambeau pour tenter de fédérer les survivants autour d'un projet de reconstruction d'un nouvel avion à partir de l'épave.
C'est aussi un point intéressant du film que de voir les personnages pas du tout gravés dans le marbre. Bien au contraire. Les caractères évoluent suivant les moments de l'action. Par exemple, le scepticisme du pilote, essentiellement dû à l'expérience du terrain et de la conduite d'avions face au théoricien et à ses calculs.
Pour Aldrich, il s'agit, dans son scénario, de mener un projet qui est un pari fou pour la survivance du groupe. Les réticences ou résistances voire des (micro) rébellions sont bien normales et rendent, par l'absence totale de manichéisme, le scénario très convaincant. L'humanisme selon Aldrich (qui est, quand même, l'objectif du projet) ne peut se réaliser que dans l'action. Et cette action est complexifiée car tout le monde n'avance pas à la même vitesse.
Il y a un véritable suspense dans le film car le spectateur ne sait pas si le "projet" va réussir ou pas. Mieux, le spectateur, présent dans cette action qu'il voit avancer au fur et à mesure de l'avancement du film ne peut pas savoir qui va s'en sortir ou pas. Toutes les options sont open et ce n'est que très tardivement qu'Aldrich fermera ou lèvera les différentes possibilités.
C'est amusant de voir que Aldrich utilisera le même type de canevas dans les "douze salopards" qu'il mettra en scène l'année suivante.
Ce qui ne gâte évidemment rien dans ce film, c'est le casting impressionnant que Aldrich réunit autour de lui.
James Stewart dans le rôle du pilote pragmatique et expérimenté mais fataliste … face à Hardy Kruger muré dans son personnage d'ingénieur peu sympathique car exigeant et autoritaire qui peu à peu réussit à fédérer le groupe.
Richard Attenborough dans le rôle du copilote. Son personnage est le maillon indispensable d'un projet difficile car il se pose en conciliateur ou médiateur entre deux parties trop impulsives…
Puis d'autres acteurs très connus comme Borgnine, Georges Kennedy, Dan Duryea, apportent leur propre charisme dans des rôles même secondaires mais superbement bien sentis. L'art du second rôle ne signifie pas, pour autant, d'y mettre des acteurs de second plan …
Très bon film d'aventures de Robert Aldrich, efficace et passionnant
Edition 10/07/2023
Révision 13/07/2023 (correction orthographe)