Synopsis : Il y a bien longtemps, à Bagdad, l'insouciant et rusé Ahmed parcourt les rues de la ville en volant tout ce qui, de près ou de loin, attire ses sens. Et tandis que les autorités religieuses promettent le fouet aux voleurs, Ahmed s'en défie et multiplie les larcins avant de rapporter son butin à son complice dans leur cachette souterraine. Pendant ce temps, un Mongolie, un prince convoite le grand palais de Bagdad et projette de se marier avec la princesse.
Ce film réalisé par Raoul Walsh ne doit sa notoriété qu'à un seul individu : ** Douglas Fairbanks ** ! Alors en plein essor de carrière, Fairbanks devient l'homme le plus bankable de l'histoire du cinéma en produisant, scénarisant et incarnant cette oeuvre ! Un rôle qui lui sied à ravir puisque ses performances acrobatiques et son corps svelte seront une force majeure pour les péripéties du jeune prince.
Malgré ces prouesses physiques, Fairbanks n'est pas l'acteur qu'on rêverait de voir : trop souriant, gesticulant à outrances, se dandinant en bombant le torse, etc. Bref, tout promeut son corps au-delà de son jeu d'acteurs ! Et ce qui est dommageable, c'est que c'est le seul acteur à admirer, les autres étant totalement secondaires...
Nous emmenant dans les contes de 1001 nuits, les décors nous poussent à l'immersion presque totale, grâce à la patte de William Cameron Menzies ! Gargantuesques, ces rues arabes retracées sur 3 hectares caractérisent bel et bien les super-productions américaines de l'époque. Le tout enjoué par la musique mélodieuse aux sonorités arabiques.
Mais alors que je regardais le film, je me suis posé la question suivante : pourquoi diable parle-t-on d'un pays à l'opposé de l'Amérique, qui traverse en ces temps-là une période beaucoup plus mouvementée qu'à l'accoutumée ? Pour voyager ? Non !
En faisant mes recherches, j'ai appris que le jeune Fairbanks avait été abandonné par son père, peu après leur arrivée à Denver lorsqu'il avait 5 ans. Sans vraiment de sous en poches, Fairbanks a du batailler et rusé pour s'élever au sommet de sa carrière, exactement comme Ahmed qui s'est hisser au rang de prince de Bagdad alors qu'il n'était qu'un voleur. Le film établit un parallèle évident entre la vie de l'acteur mais également du réalisateur : Walsh, fils d'immigré irlandais, promeut également le rêve américain et l'ascenseur social, en vogue aux USA.
En continuant mes recherches, j'ai pu établir une hypothèse qui me semble être fiable et limpide. Nous sommes en 1924, soit peu de temps après la Grande Guerre, où les pays européens tentent de se relever d'une perte vitale et financière. L'empire britannique perd peu à peu ses colonies et l'Irak marque son indépendance peu de temps après (1932) ; de même que la Mongolie, alors rattachée à l'URSS (1924). Les USA, adoptant un isolationnisme, transfert leur beauté orientale par Bagdad, alors seconde ville la plus prolifique du Moyen-Orient et carrefours de commerces indéniables, et enhardissent les mongols par la peur du Péril Jaune (peur drastique des hommes blancs face aux hommes asiatiques qui pourraient dominer le monde).
Comme je l'ai mentionné, la Mongolie de l'époque est rattachée à l'URSS et donc, au communisme, mouvement politique qui vont à l'encontre de la pensée américaine. Il s'agit donc bien, à mon sens, d'un message politique subtile. Mais ce n'est pas tout ! Les USA ont connu une grande période mouvementée, dû à l'industrialisation massive (ce qui échouera à une crise économique sans précédent) et à une remontée forte du Ku Klux Klan(notamment dû à la sortie quelques années auparavant de Naissance d'une nation - pour lequel Fairbanks et Walsh ont travaillé). Cette révolte envers les immigrés est pour moi un point clé au travers de Walsh, irlandais, qui le traduit dans le film comme l'invasion mongole qui surgit dans la Capitale. Elle n'attaque donc pas de front, mais est déjà présente, cachée parmi la foule ! On pourrait notamment aussi établir la comparaison avec la prohibition, cette peur de la mafia, qui agit également dans l'ombre. Quoiqu'il en soit, beaucoup trop de liens dans le contexte historique qui doivent être mentionnés !
En terme de techniques, pas de grande révolution : beaucoup de rythmes de plans entre large et serrés (qui dynamisent grandement l'oeuvre). En revanche, les effets profusent à gogo : entre les combats titanesques, les effets magiques de la corde ou encore le tapis volant, c'est un vrai panel magique que nous offrent Le voleur de Bagdad allant même à rendre la scène du tapis volant réaliste ! Ces scènes de fin, où le tapis s'envolent, donnent un nouvel élan de fraicheur, avec un fond animé, une foule en folie, qui change totalement la donne.
Le voleur de Bagdad est un film à voir, et à comprendre tant par son acteur Fairbanks, au sommet de son art, que par le contexte politique qui entoure les USA ou encore les techniques mises en avant pour les FX. Il est sûr que ce n'est pas le film du siècle mais on comprend l'impact qu'il a eu sur l'Histoire du Cinéma, tant il se veut envoutant et exotique.