Cette mode de mettre en scène des photographe commence à me poser un problème. C'était en tout cas une réflexion qui m'a traversé l'esprit plus tôt dans l'année quand Civil War montrait déjà des journaliste en road trip au milieu des États-Unis, elle a germé pendant les 2 ennuyeuses heures de A son image plus récemment, Lee Miller m'oblige enfin à tenter de formuler ce problème.
Ces films sont des sortes de trains fantôme dans lesquels les protagonistes passent armés de leurs appareils photo. Une forme de distance se crée alors entre la photographe et son sujet, elle n'est pas là pour prendre parti, elle est extérieur à toute considération politique, elle n'est là "que" pour informer, mais dans une définition de l'information très réductrice. La photo d'un charnier dans un train en Pologne, la photo d'indépendantistes armés en Corse ou encore celle d'un pendu dans un hangar aux US peuvent en effet provoquer des réactions, mais quelles résonnance peuvent elles trouver si ces évènements historiques ne sont pas replacés dans leur contexte ? Dit autrement : montrer le désespoir d'une jeune fille affamée dans un camp de la mort est en effet important, mais puisque la photographe ne fait que passer au milieu de ces horreurs, elle n'a aucun discours à tenir sur les structures ayant permis à ces exactions d'advenir, elle ne dit rien de la déshumanisation, rien du fascisme, rien des dynamiques de pouvoir propre à ce système.
En résulte que cette distance entre la photographe et son sujet se retrouve doublée puisque le spectateur à un œil extérieur sur la trajectoire d'une photographe ayant elle-même un œil extérieur sur les faits. Laisser cette distance se creuser, c'est prendre le risque de donner aux spectateurs la possibilité de prendre ces faits historiques comme des évènements lointains, des folies meurtrières trop graves pour être comprises, trop extrêmes pour être reproduites.
Reste donc un joli travail sur la reproduction des photos qui pourra ravir les profs d'histoire au collège.