"J'allais pas le rater, ça me connait les flingues"

À ce stade, c'est du grand art. Il y aurait tant de choses à dire sur Les Affranchis que je ne sais pas par où commencer. Mais je vais déjà commencer par dire que c'est de loin le meilleur film sur la Mafia. Et j'ajouterais que c'est l'un des plus grands films jamais réalisés, tout court.

On passe du rêve au cauchemar dans un univers de gangsters sublimé, mais bien réel. Le spectateur, aux côtés de Henry et de Karen Hill, vit sa lune de miel avec le monde de la Mafia, avant de découvrir ses travers, d'être pris dans l'engrenage et de finir par la voir pour ce qu'elle est : malsaine et impitoyable. Scorsese nous fait passer du glamour à l'angoisse, du rêve à l'enfer, avec une main de maître. Sur presque 2h30 de film, le rythme ne retombe jamais. De bout en bout, on est pris dans ce tourbillon de scènes qui sont d'une rare spontanéité. On est totalement solidaires du couple vedette, on a l'impression, nous aussi, d'être dans le collimateur de la pègre après avoir été éblouis par ses promesses.

Tout est bon dans ce film : un scénario calibré au millimètre, des plans d'anthologie, des dialogues efficaces, des voix off bien placées alors qu'elles sont souvent si intrusives, cette énergie dans la réalisation, ces dérapages de caméra contrôlés, ces enchaînements...! C'est sexy, habile, intense, anxiogène et bien rythmé... Une perfection cinématographique. Ça fourmille de détails qui sont la preuve d'un sens de l'observation acéré et inspiré de la part de Scorsese (bon sang, quel talent!).

Et puis le casting a tout bon. En vedette, une Lorraine Bracco superbe, authentique et sauvage qui donne la réplique à un Ray Liotta vif, angoissé et charmeur. Sans oublier Joe Pesci, aboyant comme un dingue, en psychopathe plus vrai que nature, un Paul Sorvino bougon, inébranlable et paternel, et bien sûr De Niro, à la fois sobre, classe et inquiétant. Voilà, bingo; c'est comme ça qu'on dirige ses acteurs. Pour l'anecdote, les producteurs voulaient Tom Cruise et Madonna dans les rôles titres (Henry et Karen). Heureusement, le réalisateur new-yorkais finit par imposer ses choix pour nous offrir l'un des meilleurs couples du cinéma.

On n'a pas fait mieux depuis (et la barre est placée très haut).

Citlal
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes 121 films indispensables, Top 10 Films, Les films vus le plus de fois, Les meilleurs films de Martin Scorsese et Les meilleurs films de mafieux

Créée

le 26 févr. 2023

Critique lue 256 fois

2 j'aime

Citlal

Écrit par

Critique lue 256 fois

2

D'autres avis sur Les Affranchis

Les Affranchis
Charlotte-Bad
9

Les Affranchis ou la démystification d'un milieu.

"Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours voulu être un gangster.". Les Affranchis, c'est l'aboutissement de toute une carrière pour Martin Scorsese. Délaissant le sujet durant les années 80, il...

le 5 mai 2012

113 j'aime

2

Les Affranchis
Docteur_Jivago
10

Ya motherfucker !

As far back as I can remember, I always wanted to be a gangster L'introduction donne tout de suite le ton, avant que Scorsese ne reprenne le récit dès le début et nous fasse suivre trente années...

le 11 nov. 2015

75 j'aime

18

Les Affranchis
Gand-Alf
10

The Nice Guys.

Vilipendé par une horde de cathos intégristes pour avoir osé mettre en images sa vision du Christ, Martin Scorsese se retrousse les manches, délaisse momentanément les sujets controversés (encore...

le 10 janv. 2017

68 j'aime

6

Du même critique

Trois couleurs : Bleu
Citlal
10

Les goûts et les couleurs

Plaît-il? En vrai je devais voir un truc récompensé toussa toussa, plébiscité par les critiques et les cinéphiles, mais je crois qu'il y a erreur sur le matos car je viens de me taper un truc...

le 10 mai 2020

19 j'aime

4

Chaplin
Citlal
5

Ou comment rater son biopic

N'ayons pas peur des mots : je crois bien être la plus grande fan de Charlie Chaplin. C'est un peu comme mon grand-oncle, dont on m'aurait raconté les frasques depuis ma plus tendre enfance, avec...

le 19 mars 2020

11 j'aime

Lola
Citlal
4

Oh lo là

C'est pas parce que c'est réalisé par Jacques Demy, à une époque qui appelle généralement à la bienveillance critique, que la médiocrité est pardonnable. À mon humble avis, je viens de voir une...

le 1 juin 2020

9 j'aime

1