Dans « Les anges du péché », son premier film, le très catholique Robert Bresson met en scène l’histoire d’une bourgeoise qui par orgueil se met en tête d’apporter la rédemption à une « réhabilitée » qui n’en veut pas. La négligence du devoir collectif au profit d’une seule âme est contraire à l’enseignement des évangiles, et sans sourciller, la fin très récupératrice, amène la mère supérieure à effectuer un virage à cent quatre vingt degré. Cette prostitution dut irriter le très croyant cinéaste (qui avait pourtant co-écrit le scénario avec Jean Giraudoux inspiré du livre de M H Lelong "Les dominicaines des prisons"), car il renia quelque peu ce film par la suite. Certes, malgré les dialogues théâtralement déclamés de Jean Giraudoux, le scénario remarquable durant une heure, sombre dans un improbable dénouement, contraire même à l’esprit de ce qui était montré jusqu’alors. En dehors de ces réserves, la mise en image précise et contrastée (remarquable jeu des voiles blancs, gris et noirs des nonnes, ainsi que des barreaux à la fois de la prison et du couvent) accompagne sans défaut une mise en scène qui va toujours à l’essentiel et qui sera la marque de fabrique du réalisateur tout au long de son œuvre cinématographique. A noter que le film suscite souvent l’émotion tout en évitant tout côté lacrymal, démontrant une remarquable précision du script (et donc un gros travail) assortit à une grande justesse musicale.