De 1950 à 1965 (et même depuis 1946 si on excepte le faiblard Le duel silencieux), AK a produit un quasi sans-faute sur cette période de sa carrière. Mais cette adaptation de la pièce de théâtre de Gorki m'a achevé. Si les bas-fonds pris comme prétexte pour dépeindre la condition humaine est une procédure habituelle du cinéaste japonais, on atteint ici des sommets de misérabilisme, en montrant les pauvres se tirant dans les pattes (sur fond de lutte de classe sociale) qui n'éprouvent aucune compassion mutuelle (pauvre mémé qui crève toute seule), exceptée l'arrivée impromptue d'un vieux sage sur lequel la misère ne semble pas avoir de prise, et qui prodigue une belle sagesse de vie. D'autant plus qu'on doit se contenter de nombreux plans fixes et dialogues pour la forme, on dirait du théâtre filmé.
Avec donc des rebondissements et un style pauvres (pléonasme), un T. Mifune qui ne brille de sa présence que durant un tiers du film, et des clodos qu'on observe pendant près de deux heures, ben on se fait chier profondément, en dépit des bonnes intentions du réalisateur (faire briller un peu de lumière dans la caboche de ces marginaux écartés de la société capitaliste). Le petit rap improvisé m'a quand même fait marrer, qui tente tant bien que mal d'adjoindre un peu de comédie dans cette tragédie étouffante et écoeurante pour le spectateur. Ce qu'il manque surtout, c'est une intrigue suffisamment solide et intéressante pour soutenir les thématiques existentialistes du film, dont les enjeux se dispersent entre les trop nombreux personnages (pourtant intéressants pour ce qu'ils représentent : samouraï déchu, acteur, prostituée, et autres marginaux de la société).