Akira Kurosawa est un cinéaste qui a la capacité de faire des films longs mais passionnants et rythmés de bout en bout. Cependant, il lui arrive parfois de s'embrouiller et de produire quelque chose d'assez lourd. C'était le cas pour l'un de ses premiers films, et c'est également le cas pour Les Bas-Fonds, ce qui nuit fortement à l’expérience cinématographique.


Je ne sais pas si cela vient de la pièce de Maxime Gorki, mais l'ensemble tourne très rapidement en rond. J'imagine que cela représente la fatalité qui pèse sur les personnages, leur incapacité à se sortir de leur situation misérable, mais c'est profondément ennuyant. Le réalisateur propose du début à la fin la même chose, c'est à dire des disputes entre des pauvres amers et égoïstes. Au début, il y a une certaine fascination à voir chaque personnage magouiller dans le but d'enlever le pain de la bouche des autres, mais quand on constate que rien n'évolue, l'ambiance déprimante du film devient communicative. L'intrigue principale, celle du personnage de Toshiro Mifune, maintient quand même un certain niveau d'intérêt, mais une fois qu'elle se termine, le film continue pendant une grosse demi-heure alors qu'il n'a strictement rien à raconter.


Kurosawa utilise quand même le matériau de base pour construire efficacement son film en huis clos. Le dortoir dans lequel se déroule l'intrigue paraît complètement délabré, et toutes les lignes obliques rendent l'endroit sordide. De plus, l'utilisation de cet espace est brillante : le réalisateur emploie la profondeur de champ pour mettre en scène les dialogues. Une discussion qui se déroule au premier plan peut ainsi avoir des répercussions sur les oreilles indiscrètes situées au second plan, voire à l'arrière plan. Il arrive même que des personnages s'avancent vers le premier plan pour interrompre la discussion. Grâce à ce système, les intrigues se nouent et se dénouent avec une facilité déconcertante.


Malheureusement, cela ne suffit pas pour rattraper les défauts susmentionnés, auxquels s'ajoute un trop plein de personnages secondaires difficiles à distinguer les uns des autres à cause de leur manque de personnalité et d'impact dans l'histoire. Bien qu'il soit loin d'être un ratage, Les Bas-fonds s'affirme timidement comme un Kurosawa mineur, dont la narration alourdit le propos déjà pesant.

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le 2 mai 2016

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