Cette troisième et dernière enquête de Maigret sous les traits d'Albert Préjean est aussi l'ultime film français produit par la Continental, société financée par des capitaux allemands durant l'Occupation.
On ne reviendra pas sur le contresens absolu que constitue le choix de Préjean, véritable antithèse du commissaire bedonnant, lent et taiseux imaginé par Simenon - puisqu'on en a déjà parlé sur le fil de "Picpus" et "Cécile est morte", les deux opus précédents - et on tentera d'en faire abstraction pour analyser le film.
C'est le réalisateur d'origine autrichienne Richard Pottier - déjà auteur de "Picpus" - qui reprend les commandes des "Caves du Majestic" - après l'intermède Maurice Tourneur - secondé par Charles Spaak qui se charge de l'adaptation et des dialogues.
Ce troisième volet est aussi le plus long (une vingtaine de minutes de plus que les deux autres) et sans doute le plus réussi : en effet, la narration est ici bien plus fluide (malgré quelques ratés), contrairement aux films précédents qui apparaissaient souvent confus.
Ici, les évènement s'enchaînent de façon assez claire, on comprend le rôle de chacun, et Pottier entretient quelques fausses pistes, s'efforçant de maintenir le suspense jusqu'à l'ultime séquence, au cours de laquelle le véritable coupable sera démasqué.
Le réalisateur peut compter sur un casting globalement convaincant, duquel se distinguent notamment Jacques Baumer, Fernand Charpin et Denise Grey, qui jouait déjà les vieilles rombières dévergondées, et le fera encore pendant quarante ans!
En revanche, même si on apprécie l'effort documentaire sur le fonctionnement invisible d'un palace parisien, on ne ressent jamais l'atmosphère propre à Simenon, qui n'avait pas son pareil pour saisir l'essence d'un lieu, d'un milieu, d'un microcosme.
Pottier préfère axer son film sur le drame humain relatif au petit Teddy, et sur le dilemme moral entre père naturel et père nourricier, ce qui nous vaut une longue séquence de dîner à trois assez artificielle.
On assiste donc à un divertissement policier correct mais à un film moyen, et à une adaptation ratée : rien de bien excitant donc, qui suffit pourtant à faire des "Caves du Majestic" le meilleur opus de cette trilogie officieuse, clairement à oublier.
Heureusement, Jean Delannoy prendra le relais une quinzaine d'années plus tard, et nous offrira deux adaptations autrement plus convaincantes du célèbre commissaire, qui aura pour l'occasion les traits de Jean Gabin, remisant aux oubliettes de l'histoire le vibrionnant Albert Préjean.