Il serait, pour ainsi dire, réducteur de cantonner Claude Sautet en sociologue qui ne ferait que dépeindre la bourgeoisie française. En transposant à l’écran le récit éponyme de Paul Guimard, le cinéaste affirme son style : saisir l’intime.
Il est audacieux d’ouvrir le rideau par le point de chute, un banal accident de la route, autour duquel s’articulera la narration. – Après un retour en arrière, Sautet nous propulse au sein du quotidien de Pierre qui, après le drame, verra surgir de son inconscience sa vie passée.
À l’aide de flashbacks empreints d’authenticité et de plans rapprochés, le spectateur se mue en témoin et contemple une succession d’instants qui composent la vie d’un homme. Prenons par exemple cette scène matinale où nous survolons avec le protagoniste les épaules nues de Romy. C’est bien là que l’œuvre puise sa force : capturer l’anodin et l’immobiliser afin que nous puissions en savourer les moments de grâce.
Possédant déjà tout pour être heureux, notre homme s’épuise dans la recherche d’un bonheur utopique. Et au fur et à mesure que l’on se rapproche de l’incident, le pire se laisse envisager et le regret d’une lettre de rupture écrite sous la colère devient pesant. Son petit monde semble perdre son élan et la partition envoûtante de Philippe Sarde ne fait que l’accentuer.
S’invitera aussi un face à face entre le spectateur et les réflexions du protagoniste nous faisant part de ses derniers tourments : son amour pour Hélène restera-t-il intact ? Car même au creux d’une fin funeste réside la beauté et le calme.
Aussi pour mettre un terme à mes écrits, j’ai été particulièrement séduit par la justesse dont les acteurs font preuve sans jamais tomber dans l’emphase.