J’ai été totalement séduit par ce film de George Sidney, qui mélange agréablement la comédie musicale et le western. Si ce dernier ne sert juste de décor, c’est en effet la comédie musicale qui est d’abord à l’honneur. Judy Garland est vraiment éblouissante : son personnage candide et naïf possède aussi une pugnacité et un sacré caractère et ne se dégonfle pas devant l’ennemi quand l’honneur des Harvey Girls est menacé (la scène ou elle saisit des pistolets pour rétablir la justice auprès de ses agresseurs est vraiment jubilatoire !).
Si les enjeux dramatiques sont assez pauvres et si l’histoire manque d’épaisseur, tous les personnages n’en manquent aucunement et c’est ce qui fait tout le charme de cette étonnante et singulière comédie musicale. En effet, la caractérisation des personnages est très soignée et on ne tombe jamais dans un manichéisme primaire avec d’un coté les gentilles filles et de l’autre les méchants garçons : j’ai d’ailleurs trouvé le film très moderne et clairement féministe (Alma prenant les outils dans l’atelier du maréchal ferrant pour ne citer que cet exemple). De plus, le film est très riche visuellement : au delà du mélange des genres, les gags surréalistes côtoient des scènes beaucoup plus musclés et réalistes, offrant une scène vraiment spectaculaire dans son final de feu …
Et que dire de Cyd Charisse qui offre toute sa grâce dans une chorégraphie très simple ou elle se contente juste de faire tournoyer sa belle robe avec une aisance et une maîtrise qui n’appartient qu’à elle ! La caméra fluide et magique de Sidney capte chacun de ses mouvements d’une divine élégance et nos yeux comme nos sens ne peuvent qu’être sidérés par la beauté de ses gestes d’une pureté extatique. Oui, je suis amoureux de Cyd Charisse et c’est pour moi la plus belle femme de l’histoire du cinéma et c’est d’ailleurs l’une des raisons qui m’a poussé à découvrir ce film, même si je savais qu’elle tenait juste un rôle secondaire. C’était donc réjouissant pour moi de découvrir cette scène qui est à mes yeux le climax du film. (voir la vidéo en dessous de la bande-annonce !).
Et puis la mise en scène de George Sidney est vraiment élégante et d’une très grande précision. Ce n’est pas la plus ‘flamboyante’ des comédies musicales que j’ai pu voir (dans les décors et les couleurs je veux dire) mais toutes les scènes sont transcendées par sa caméra mouvante qui saisit magistralement les chorégraphies (par moment, j’ai pensé à du Max Ophüls) et les déplacements des comédiens dans le champ visuel ! Un vrai délice pour les yeux (encore une fois !). Et j’aime cette idée qu’on voit par moment juste les ombres des tables et des chaises dans les plans (la scène de Cyd Charisse justement), le cinéaste et son chef opérateur délaissant le lumineux et le coté étincelant des comédies musicales au profit du réalisme et de la sobriété, se reposant ainsi sur un jeu de lumière juste bien élaboré.
Les chansons écrites principalement par Johnny Mercer – un des plus grands auteur-compositeurs d’Hollywood (1) – sont enjouées, entêtantes et euphorisantes à souhait dans les scènes de groupes (magnifique première séquence à la gare quand les futur Harvey girls arrivent dans la ville de Sandrock) et beaucoup plus lyrique et romanesque dans les scène plus intimes. Après la présentation du personnage de Susan Bradley dans le train, le film s’ouvre sur une superbe danse enivrante et ardu à organiser sur la chanson On The Atchison, Topeka and the Santa Fe ou le talent du chorégraphe Robert Alton s’épanouit sur une durée incroyable de presque dix minutes !
Pourquoi The Harvey girls est-il si peu populaire contrairement à d’autres comme The Band wagon ou Singin’ in the rain ? Est ce ce mélange des genres ou le manque de flamboyance ? Peu importe car je me suis vraiment régalé et je peux affirmer haut et fort qu’il s’agit d’une des plus belles comédies musicales que j’ai vu, même si elle est loin d’être parfaite.
(1) – Voir sa biographie sur wikipedia