Mine de rien, cela faisait une bonne dizaine d'années que je n'avais pas revu « Les Désastreuses aventures des orphelins Baudelaire », dont je gardais un excellent souvenir. Ce second visionnage s'est avéré un peu moins probant, même si l'impression générale reste positive. Le scénario m'a notamment légèrement déçu, ne me paraissant pas exploiter toutes ses possibilités (notamment quant aux « talents » du trio, totalement sous-exploités voire carrément pas du tout), la dimension un peu répétitive de ce dernier se faisant également ressentir sur la durée. Toutefois, même si je n'ai pas retrouvé la jubilation passée, le boulot est plus que bien fait.
Cela n'a échappé à personne : ce projet semblait taillé sur mesure pour Tim Burton, et même si c'est finalement Brad Silberling qui en a hérité, certains aspects « burtoniens » restent perceptibles à l'écran : d'abord parce que c'est son habituel chef décorateur Rick Heinrichs qui est à la manœuvre et que ce dernier a fait un sacré boulot : gothiques à souhait, inquiétants tout en restant souvent étrangement séduisants, dans une logique très théâtrale illustrée avec talent. Si certaines scènes manquent un peu de panache, d'autres
(la voiture bloquée sur les rails, la mer infestée de sangsues)
sont très réussies : il y a chez le réalisateur une volonté constante d'imaginer, de jouer, avec ce qu'il faut de méchanceté bien placée pour relever la sauce au bon moment.
Surtout, si les seconds rôles ont un peu de mal à exister, Emily Browning montrait déjà un gros potentiel, talent (et beauté) qu'elle confirmera joliment par la suite, mais l'attraction principale du film reste évidemment Jim Carrey : pouvant laisser libre cours à ses excès en tout genre et à son énergie débordante, habile mélange d'emphase théâtrale outrancière et et d'expressivité délirante, ponctué de quelques grands numéros transformistes où les maquilleurs se sont surpassés. Bref, malgré quelques aspects curieusement inexploités et un revisionnage moins enthousiaste, cet univers étrange, légèrement insolite, forts de héros plutôt séduisants et d'un méchant d'anthologie, a de quoi susciter un réel attrait, à l'image d'un très beau générique de fin, illustrant parfaitement l'identité de l'œuvre. À (re)découvrir.