Après Le Faucon maltais, Quand la ville dort, L’Odyssée de l’African Queen ou Moby Dick, John Huston filmait, avec Les Désaxés, les contrecoups d’un héritage historique, celui des pionniers de l’Ouest américain. Soit le bilan d’un vieux monde, qui était enfin montré à l’écran. Une réussite qui a acquis la réputation de film crépusculaire, signant la disparition future de grandes figures du cinéma et la fin d’une certaine idée de l’American Dream.

Le mythe de l’Ouest américain a fasciné Hollywood et généré un nombre considérable d’œuvres artistiques et culturelles (Il était une fois dans l’Ouest, La Ruée vers l’Ouest, La Conquête de l’Ouest, Rio Bravo, Au nom de la loi, Les Mystères de l’Ouest…). Les raisons de cet attrait, de cette productivité sur bobines sont avant tout géo-historiques. L’appropriation du territoire nord-américain par les colons, après le massacre des Amérindiens, était la promesse d’une vie à l’Ouest, avec des terres vierges à exploiter, renforçant l’idée d’une expansion providentielle. Ce fut l’époque des cowboys, des trappeurs, des ranchs face aux collines, des carcasses de bisons, des chemins de fer, de la ruée vers l’or californien. Lorsqu’on stagnait à l’Est, l’Ouest offrait des nouvelles opportunités et symbolisait une partie du rêve américain. Les Désaxés est l’histoire de la désillusion de ce rêve, à travers quatre personnages aveuglés par les mirages d’une zone désertique : ceux du Nevada. Ses étendues sauvages sont le théâtre d’âmes qui s’étiolent, devant le contrecoup d’une société moderne qui bâillonne les aspirations individuelles, les désirs d’autonomie, les puissantes envies de liberté.

Le long métrage évoque de façon permanente ce mythe de l’Ouest en arrière-plan. La réalité montre qu’il n’en reste que des vestiges.

De la difficulté d’être en marge

Les désaxés, ce sont Roslyn Taber, “ex-épouse désenchantée”, Gay Langland, “cowboy vieillissant”, Guido, “mécanicien au cœur brisé”, et Perce Howland, “cavalier de rodéo usé par le temps”.

Un soin particulier a été accordé à l’écriture de chacun de ces personnages qui verbalisent le propos général du film et son sous-texte.

Ce sont des marginaux, des individus en dehors de l’éventail des normes, ne suivant pas les règles généralement attendues par la société. Tous vivent une crise existentielle qui les pousse à revoir l’écosystème de leur vie (leur environnement, leur relation sociale, leur moyen de subsistance) et forment un groupe qui décide de passer du temps ensemble, le plus souvent avec quelques verres de whisky. Au milieu du désert, l’alcool permet d’oublier, de mieux se comprendre, d’aller à l’essentiel, d’enivrer une danse, mais provoque aussi des rancœurs, des peurs, et réactive de vieilles souffrances.

Chacun est victime d’un passé, d’un trauma ayant engendré un mal-être.

L’ex-épouse désenchantée

Roslyn Tabe d’abord, incarnée par Marilyn Monroe. Diaphane, perdue, à fleur de peau, ses élans de vie spontanés masquent un divorce qu’elle essaye de fuir, faisant écho à la propre vie de l’actrice (elle était en instance de devenir l’ex-épouse d’Arthur Miller, scénariste du film.)

C’est une femme qui pense que le plus important n’est pas de dire que son ex-mari était violent, mais qu’il semblait toujours absent.

On pouvait le toucher, mais il n’était pas là.

Son maquillage nacré, son regard candide, ses gestes graciles évoquent une fragilité, une mélancolie latente.

Je trouve qu’on ne devrait jamais avoir d’enfant, sauf si on s’aime, car les enfants voient la différence. J’ai vu cette différence.

Elle porte un regard sur le monde avec la grâce et l’innocence d’une enfant, même si elle peut se montrer lucide. Lorsqu’une discussion devient conflictuelle, elle s’élance tout à coup dans l’espace avec enthousiasme, se rue vers un ailleurs pour mieux s’extraire des difficultés de l’instant présent. Ce mécanisme de protection l’empêche de progresser, de gagner en maturité et d’être face à elle-même. Mais elle possède d’autres qualités, comme son empathie qui peut être débordante.

(...)

Pour lire la critique complète : https://www.lemagducine.fr/cinema/films-classiques/les-desaxes-ou-les-mirages-de-louest-10065340/

Je suis désolé de ne pas pouvoir vous la partager directement sur SC.

OkaLiptus
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le 1 déc. 2023

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Oka Liptus

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