Intéressant polar qui vaut la peine de se déplacer pour le voir. Ce volet des enquêtes du département V nous embarque dans un film glauque à souhait qui remplit une par une toutes les caractéristiques du polar à la scandinave. Critique de leur modèle idyllique, de l'éducation des jeunes, de ces riches et puissants qui se permettent les pires atrocités en toute impunité parce que la société les protège ; héros qui n'en est pas un, personnage principal taiseux et cabossé qui se reconnaît dans les protagonistes étranges sur lesquels il doit enquêter, bref, un bon vieux polar sale, sombre et amer comme on les aime.
Jolies images, climat dégueulasse, ambiance soignée, beaux plans, méchants bien sales et méchants, acteurs en pleine forme et bonne gestion du rythme.
Maintenant ... Le film reste convenu, bien trop convenu. L'intrigue est très prévisible, même si elle se suit, je l'ai dit, avec plaisir, et on en devine vite les divers rebondissements. Quelques ficelles un peu grosses, aussi (c'est marrant comme Assad n'est jamais là quand on a besoin de lui, le temps que son cher coéquipier se prenne quelques dérouillées), et une confrontation finale à la fois prévisible et convenue - rappelant en sus très fortement la fin du premier tome de Millénium, dont l'influence se fait sentir à de nombreuses reprises. Mais n'est pas Millénium qui veut, et le propos, bien que sombre et amer, n'est guère poussé très loin et certaines pistes ne sont qu'amorcées (la belle-mère de Kimmie, par exemple, qui aurait pu faire un bon personnage secondaire). Quelques scènes inutilement trash pour le plaisir de choquer ou mettre mal à l'aise, mais ce n'est là qu'un ressenti personnel pour le coup.
Bref, un bon petit polar, visionnage sympathique à l'ambiance suffisamment prenante et soignée pour qu'on ne regrette pas d'être venu ; mais rien de bien marquant dans ce polar qui ne réussit pas vraiment à se détacher du reste des productions du genre. Et dans le genre polar suédois sombre, on est tout de même relativement bien servis ces derniers temps, aussi la concurrence est-elle rude.
Restent donc cette ambiance, ces images, et quelques "gueules" ou scènes marquantes, traitées, il faut le reconnaître, avec soin et mesure. Dommage donc qu'on n'ait pas osé pousser plus loin et sortir des sentiers battus.