Les Félins, c'était un vieux souvenir de soirée télé, pas marquant pour un sou. Revoir ce film de René Clément est un bonheur d'esthète et presque un ravissement malgré une intrigue piochée chez Day Keene, série noire sans grande ambitions. Oui, mais avec l'aide de Pascal Jardin et Charles Williams pour le scénario ce manège à trois (et même quatre avec un protagoniste caché) et la mise en scène racée de Clément (un auteur, pas un simple bon artisan), le film a une vraie gueule d'atmosphère vénéneuse. La musique du grand Lalo Schifrin est époustouflante, en particulier dans les scènes d'action, dissonante à l'occasion et véritable "personnage" de ces Félins, exaltant les décors sophistiqués et baroques de la villa où se dénoue le récit. Alain Delon, au summum de sa beauté, est remarquable dans le principal rôle masculin, confronté aux manipulations de Lola Albright et de Jane Fonda, somptueuses créatures aux desseins retors. Incompris par la critique française lors de sa sortie, "en tant que film de genre, Les Félins est novateur grâce à sa combinaison d’esthétisme postmoderne, de parodie, d’érotisme et d’absurde." a écrit Danitza Bantcheva à l'occasion de la rétrospective consacrée à René Clément par le Festival de cinéma de La Rochelle 2021. On ne saurait mieux dire.