Faute de mieux, Les filles d'Olfa a été rangé sous l'étiquette de "documentaire". Ce qui n'est évidemment pas faux, puisque le film de Kaouther Ben Hania montre certaines des véritables protagonistes d'une histoire qui a ému la Tunisie, mais le terme s'avère réducteur puisque le long-métrage fait jouer à deux actrices les rôles de deux des filles d'Olfa, qui un jour ont disparu, "prises par le loup". Ce n'est pas la frontière entre la réalité et la fiction qui est brouillée mais celle de la première avec sa reconstitution. A la vérité, c'est encore plus que cela, avec le personnage de la mère, "joué" tour à tour par la véritable et son interprète. Cela prête nécessairement à confusion pour le spectateur qui ne sait plus parfois s'il entend des témoignages réels ou une recréation de certaines scènes. Et c'est justement la complexité du dispositif, qui suscite l'émotion (très forte) et le rire, puisque tout se mélange dans un film qui a par ailleurs des allures de catharsis, pour celles qui revivent leur passé. Oui, Les filles d'Olfa contient sa part de manipulation et d'impudeur, d'autant que la réalisatrice a fait preuve de beaucoup de subtilité dans un montage fait pour nous perdre un peu mais sans s'égarer pour autant. Portrait de deux générations de femmes tunisiennes, avant et après la révolution, le film traite de la transmission récurrente des oppressions et de l'espoir de les voir enfin disparaître. Bien mieux que pourrait le faire une fiction ou ... un vrai documentaire.