Peut-être le plus beau film de guerre qu'il m'ait été donné de voir. J'ai envie d'écrire le plus vrai. C'est comme si Wellman avait filmé la guerre en prise directe.
La date, 1945, n'y est sûrement pas étrangère, mais au-delà du contexte, Wellman déploie des trésors d'ingéniosité pour nous conquérir.
Il utilise le personnage d'Ernie Pyle, correspondant de guerre pulizarisé en plein conflit, pour nous ouvrir le quotidien d'une compagnie US, que l'on suit de la Tunisie à Monte Cassino.
Il paraît que la ressemblance de l'acteur Burgess Meredith (alias l'entraîneur de Rocky, eh ouais) avec le célèbre reporter avait frappé les esprits de l'époque. Ayant fait un tour sur Google Images, je dois reconnaître que c'est flagrant.
Le scénario a d'ailleurs été écrit à partir des carnets de guerre du journaliste. D'où l'aspect réaliste du film, loin de tout sentimentalisme dont l'Amérique a l'habitude de nous abreuver dès qu'il s'agit de ses Boys partis se rouler dans la boue on ne sait où.
Wellman se sert de gimmicks pour nous rapprocher de cette bande de bleus qui ne vont pas tarder à devenir de solides vétérans. Exemple : un petit chien (surnommé l'Arabe) recueilli en Tunisie nous accompagne durant tout le film. Le sosie d'Idéfix ! Comme la personne d'Ernie Pyle, il humanise la terreur de la guerre, la rend concrète.
Des plans et des cadrages à montrer tous les jours en ouverture des cours de la Fémis. Merde, on en est à se dire que les champs de batailles sont beaux. Et c'est vrai qu'un paysage brisé, broyé, c'est diablement beau.
Autre mérite du film, il a révélé Robert Mitchum au grand public. Et là je dois dire que Bob, barbu, m'a impressionné dans ce qui est pour moi son meilleur rôle, celui d'un officier respecté par ses troupes.
Tout en retenu, beau, ténébreux et lumineux à la fois. Une aura de malade. Le plan de fin où il gît mort ressemble au cliché de la dépouille du Che Guevara. Auparavant, son corps, comme celui d'autres soldats, a été ramené du champ de bataille à dos de mule. Magnifique. Il a 27 ans.
J'en suis à me dire que son potentiel n'a pas été exploité au maximum par Hollywood, qui l'a souvent cantonné dans les rôles de brutes ou de maniaques. Too bad.
Pour être complet, Wellman s'est inspiré du documentaire de John Huston, la Bataille de San Pietro, qui s'attache à montrer les soldats de l'infanterie englués dans la boue et constamment pilonnés par l'armée allemande.
En résumé, les Forçats de la gloire sont une sorte de Band of Brothers avant l'heure. Mais attention le film a été tourné à une époque où le cinéma était l'art visuel dominant. Ce qui n'est malheureusement plus le cas.
PS : le titre en VO est rigolo : The Story of GI Joe.
PPS : Un clin d'oeil à Scritch et Torpenn, l'assistant réalisateur n'est autre que Robert Aldrich.