Malgré son titre à la Nuri Bilge Ceylan, il est évident que Les graines du figuier sauvage, réalisé par Mohammad Rasoulof, sert une ambition plus politique que poétique, dans l'actualité d'un pays, l'Iran, en proie à de fortes convulsions depuis des mois. Ce contexte, relayé par de nombreuses vidéos ayant circulé sur les réseaux sociaux, rythme une histoire qui va ébranler une famille "bourgeoise" de Téhéran, jusque dans ses fondements. "Femme, Vie, Liberté", ce slogan a fait le tour du monde, accompagné d'images ignominieuses de répression d'un régime de mollahs aux abois. Densité, intensité, puissance : le récit de Rasoulof se déploie avec une dextérité impressionnante au sein de la famille évoquée plus haut où le père, fonctionnaire et donc complice d'un système, va se heurter à ses deux filles, sous le regard d'arbitre de la mère. Le film est exceptionnel, et pas seulement pour son courage, mais aussi pour sa construction, avec une poignée de scènes incroyables, pendant plus de deux heures. Il sera permis d'être un peu moins enthousiaste sur la dernière demi-heure, qui prend la forme d'un véritable thriller, qui surprend, dans le sens où il tranche avec tout ce qui a précédé, par un côté plutôt excessif et un symbolisme pesant. Cette faute de goût, qui n'en sera sans doute pas une pour beaucoup de spectateurs, ne saurait ternir en rien la force d'un film dont on espère qu'il ne fait que précéder la chute d'un régime parmi les plus méprisables sur la planète, même s'il y a une certaine concurrence en la matière, hélas.