We crown the night
En littérature, on dit d’un début qu’il est in medias res lorsqu’il commence sur une action abrupte, sans introduction ou mise en contexte : on donne au lecteur le sentiment que le récit a commencé...
le 7 mai 2021
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Au cœur de la nuit profonde, je suis tapis, prêt à bondir, à me jeter sur l'inconnu, à lui lacérer les chairs, à lui dévorer les yeux et la langue, à le faire hurler, le vulgaire porc qu'il devient entre mes griffes. Lorsqu'il dort, je suis là, lorsqu'il s'éveille, se voit libéré de mon joug, je suis présent, je m'instigue dans son crâne, me bâfrant de son esprit, le violant à tout rompre, l'explosant en un sanglant geyser, léchant, lapant son énergie, le rendant dingue, barjot, pitoyable, juste bon à achever par une indicible terreur... Je suis le marchand de sable, les griffes de la nuit...
Freddy Krueger est un jeune type peu habilité à se socialiser. Comprenez bien, Freddy n'est pas franchement beau ; il a de grands bras, des fringues merdiques, une vilaine peau, bref, pas le genre à faire tomber les nanas. On pourrait affirmer sans hésiter que le larron ne fait pas rêver. Et pourtant... Et pourtant Krueger est présent, constamment dirais-je, dans les rêves des jeunes filles en fleur, certaines le cherche même, non sans craindre ses doigts crochus sur leurs peaux d'albâtre. Quand elles le trouvent au sein de sordides fantasmes, peu en réchappent. Les jeunes hommes sont également à son goût, Freddy ne fait pas dans la dentelle ni dans le genre, il s'engouffre dans le pieu avec eux. Lorsqu'il les attrape, on peut se dire que ce sera immonde comme la fin du monde.
Trêves de baragouinages ''ironicomique'' et affirmons une chose très simple pour ne plus avoir à la retenir au dessus du pot ; Les Griffes de la Nuit synthétise, à mon sens, le slasher parfait. Si le genre est tellement galvaudé aujourd'hui avec ses archétypes de monstres/psychopathes/mutants débiles, ses protagonistes hystériques, ses blacks crevant parmi les premiers, ses potiches blondes hurlant comme des truies qu'on égorge, ses couples fornicateurs se faisant trucider pour respecter la bonne morale Américaine qui t'interdit le sexe avant le mariage et surtout... surtout pas en levrette parce que, tu comprends, t’avilis ta femme là...et je te parles même pas de la sodomie... Pour les plus grands producteurs de films pornos au monde ça se pose là... Mais bref, je m'égare.
Si le genre est tellement galvaudé aujourd'hui, disais-je, il est évident de reconnaître que des films comme les Griffes de la Nuit respectent certains de ces codes, pour autant, le résultat est magistral. Il est magistral car il prend comme cadre un élément fascinant : le cauchemar. Tout se déroule dans les premiers temps en rêve, si bien que le réveil nous ramène à une réalité plus douce où va se mêler le scepticisme des uns, la crainte des autres. Au fil du temps, l'état de veille se trouve corrompu par une terreur omniprésente, une fatigue constante. La réalité s’effondre au profit d'une néoréalité où Freddy te trouve, te chasse et t'éviscère. L'horreur n'est pas forcée, elle monte crescendo et t'explose à la gueule en confettis de boyaux. L'horreur est par ailleurs soulignée d'effets visuels propres au rêve, que ce soit dans la distorsion de la matière que dans les apparitions et déplacements inexpliqués.
Dans l'ensemble, le boulot de Craven d'enfermer son spectateur dans l'angoisse permanente d'un énième surgissement de Freddy fonctionne avec brio, faisant du film une expérience, non pas traumatisante mais terriblement efficace.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes J'emmène au creux de mon ombre...des poussières de toi, En 2016, je vais sucer la moelle du cinéma, Horreur, ô désespoir, ô vieillesse ennemie... et Les meilleurs films de 1984
Créée
le 13 oct. 2016
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