J'ai pris ce film de Alex van Warmerdom à la médiathèque uniquement à partir de son résumé au dos du boîtier qui se contentait de décrire les différents personnages du film, présageant une bonne dose de loufoquerie.
Je me suis ainsi retrouvé face à un espèce de huit-clos géant, si j'ose dire, atypique, drôle, absurde mais aussi angoissant et claustrophobique à l'image de cette étrange forêt aux troncs bien trop droits, au fond bien trop noir et d'où il ne semble pouvoir ne surgir aucune lueur de bonheur.
Le village, quasi inhabité voir désertique pour ainsi dire, a son lot de personnages marquants, du facteur un peu trop curieux et solitaire au gros muet à moto en passant par le jeune garçon grimé d'une black-face se prenant parfois pour Lumumba (ancien Premier ministre de la RDC) perché sur le facteur sus-nommé.
Nous avons également dans notre joyeux village abandonné comme une symétrie entre deux couples : le premier composé d'un chasseur parano, stérile et frigide accompagné d'une femme aux envies charnelles bien naturelles face aux parents du jeune «Lumumba» : un boucher pervers mais surtout violeur pathologique accompagné de sa pauvre dévote de femme qui semble vouer un culte particulier à St Francois au point de se priver de nourriture.
Comme dans toutes petites bourgades qui se respectent, tout se sait ; des affres du boucher jusqu'à la convalescence de sa femme sous-nutrie (au moins une chose pour laquelle elle est consentante) qui provoque un véritable culte pour sa personne chez les habitants, privés qu'ils sont d'église en bonne et due forme.
L'arrivée de missionnaires catholiques français qui organisent une sorte d'exposition coloniale à petite échelle au milieu du film permettront l'ajout de perturbations à ce tableau déjà bien... Wtf ? (Je vous ai parlé de la femme pédophile se glissant une nuit dans le lit du jeune homme qui se prend pour le Premier ministre congolais ?).
Devant ce film, j'ai direct pensé à Delicatessen : c'est drôle, absurde, oppressant et parfois crade. Il y a un côté théâtral et irréel difficile à expliquer, en un mot : surréaliste. On navigue entre des couleurs ternes, des ambiances désertiques où parfois survient une chatoyance vive et imprévisible. Ce microcosme a une vie et ses propres codes que j'ai apprécié décoder le long des 1h45 de film.
Quand arrive le générique, même si je ne savais finalement pas trop, ce qu'on m'avait mis sous les yeux, j'avais la certitude d'avoir apprécié cette bizarrerie néerlandaise. Une bonne occasion pour s'intéresser de plus près à Borgman du même réalisateur !