Un grand film sur pas grand-chose. Un film déstabilisant car toutes les pistes d'intrigue sont désamorcées progressivement avec le temps qui passe.
Sans aucune musique et sous la neige qui ne cesse de tomber dans les montagnes d'Anatolie et le Kurdistan, la vie d'un prof citadin en service civil défile au rythme des cours pour des enfants pauvres et ruraux, de la coloc avec son campagnard de coloc un peu coincé, des rencontres avec une autre citadine activiste amputée par le fanatisme de retour dans sa région natale, des cuites chez le vieux Vahit. Derrière, en filigrane, la misère des paysans, le désespoir des jeunes, l'aveuglement de l'administration, la violence des fanatiques, l'oppression du pouvoir, l'attirance pour ce qui diffère. Tout ça rarement montré ouvertement mais tout en subtilités, en symboles, en suggestions et en parallélismes. Un film qui reste dans la tête avec un personnage principal très petit, très puéril mais pas non plus manichéen. Un film qui réussit à montrer une humanité en nuances.
Ca papote pas mal et sur les 3h17, on a forcément des longueurs mais qu'est-ce que c'est beau, notamment ces paysages anatoliens proprement hallu. Casting très fort, surtout le personnage principal Deniz Celiloglu. Dommage pour la fin, un peu trop appuyée avec cette narration malvenue et pas vraiment finie.