J'étais impatient de voir "Horizons perdus" programmé cet été au Festival de cinéma en plein air de La Villette. Tout se combinait idéalement : qui voudrait snober un Capra ? Avec l'Himalaya comme cadre ? Le Graal - pour un fada de montagne... Sur la légende de Shangri La, d'après le roman de James Hilton ? Que les fanas du Tibet chantent d'allégresse !
Calmos, mes frères ! Les hauts plateaux métaphysiques m'ont vite refroidi... Car "Horizons perdus" est perclus de faiblesses. L'action démarre pourtant fort bien. En 1935 les Japonais envahissent la Chine : le diplomate britannique Robert Conway (Ronald Colman) organise l'évacuation des Occidentaux de Bakul. Avec quatre passagers, il prend le dernier avion pour Shanghai. Mais un pirate détourne l'avion qui s'écrase dans l'Himalaya. Les naufragés sont recueillis dans une vallée tibétaine coupée du reste du monde. Et là, je commence à déchanter.
Plusieurs acteurs sont médiocres, comme George, le frère de Robert Conway (John Howard), dont le manque de subtilité handicape l'action. Les actrices jouant une passagère et une femme vivant dans la vallée ne brillent guère par leur talent. Pourquoi Capra les a-t-il recrutés ? Quant au Grand Lama, son maquillage de Mathusalem est un tel ratage qu'il décrédibilise son discours de sagesse... Enfin un acteur chevronné (Thomas Mitchell) bavarde à n'en plus finir, multiplie les blagues idiotes...
"Horizons perdus" a très mal vieilli. Pour des raisons commerciales, il a été amputé de plusieurs scènes, remplacées aujourd'hui par des photos illustrant la bande sonore... Surtout Capra exalte à plaisir un monde sans police, ni prisons, ni tribunaux, où tout le monde est gentil, plein de bonnes intentions, propre sur lui et dans sa tête... Le conte merveilleux où Shangri La représente le Paradis perdu est trop mièvre, vire à la guimauve... Je suis reparti chez moi en rogne, Frank ! je ne digère pas les meringues - elles m'écoeurent mêmes himalayennes...