Brian De Palma, cinéaste maniériste, obsessif, cérébral et pervers ne réussira jamais à être "classique", et, pour être son plus grand succès populaire, "les Incorruptibles" n'ont rien de classique : entre la narration emballée quand le scénario saute allègrement nombre de scènes "obligées" pour se concentrer sur les moments de bravoure les plus "théoriques", le désintérêt flagrant que De Palma manifeste envers ses acteurs, abandonnés à un statut soit iconique (Connery étincelle, De Niro se caricature déjà) soit fantasmatique (Costner est inexistant, oui, encore plus que d'habitude), et le soin maniaque apporté à la mécanique hyper complexe des plans, "les Incorruptibles" est un film profondément manipulateur - comme toujours chez De Palma -, et souvent irresponsable de cruauté (la mort d'un enfant en ouverture, le sadisme récurrent des images de cadavres ensanglantés). Pourtant, il procure une sorte d'ivresse, largement inexplicable d'ailleurs, qui est celle des grands films, et qui aura sans doute contribué largement à son succès. [Critique écrite en 2010]