Quelle différence y a-t-il entre la télévision et le cinéma ?
À sa manière, le film de De Palma apporte une réponse claire, efficace et cynique. Tirée de la célèbre série avec Robert Stack et gonflée par un budget confortable, dotée d'un casting flamboyant, d'une musique de premier ordre et d'un scénario de David Mamet, cette commande de la Paramount veut justement faire la différence.
À travers l’œil de De Palma, cinéaste de la citation et parfois de la déception, cela signifie s'inspirer d'un show télé en ajoutant à cet univers, un supplément cinématographique d'érudit. Si possible en étalant sa grande connaissance du cinéma russe, faut bien qu'il nous éduque nous qui sommes cons comme des manches.
J'y reviendrai...
Le scénario est simple, c'est un western. Il y a un nouveau shérif en ville et on va voir qui est le patron.
On pourrait penser que ce postulat de départ permettrait à Brian de miser sur l'efficacité de sa mise en scène, pourtant non, il décide de plomber son film. Sa mise en images, lissée à l'extrême, est là pour servir la soupe, pour nous montrer que les décors sont très beaux, qu'il y a de la voiture d'époque, de la sulfateuse... tout ça au détriment de toute étincelle de psychologie.
Les personnages, en plus de n'être que des archétypes (le bon qu'on n'achète pas, le vieux flic qu'on avait rangé dans un grenier et qui sait comment s'y prendre pour faire mal aux forces du Mal, le jeune flic, le flic qu'est pas vraiment un flic mais qui va le devenir...) finissent par ressembler à de pâles copies des acteurs du serial.
De Palma opte pour classicisme délesté des formes de perversion qui hantaient son cinéma et tente peut-être autre chose qu'être le cinéaste obsessionnel qui rend hommage à Alfred. Pour y parvenir je suppose, il choisit d'utiliser, dans ce qu'on pourra considérer comme le morceau de bravoure du film, la scène de la gare, des techniques inventées par les maîtres russes du muet. Là où Eisenstein jouait avec l'expression des visages pour définir les intentions des personnages, créant des strates, une épaisseur, avec Brian, on est dans l'épate, un côté Disneyland superficiel qui, comme ce bébé hilare, peut nous faire sourire à chaque fois. Je doute que l'intention première était de déclencher sourires et soupirs chez les spectateurs, pourtant, il est difficile de se retenir.
Une séquence censée marquer, comme elle marqua le Cuirassé Potemkine. Or, l'analogie n'est qu'une façade ici, tant la vacuité est évidente.
Ajoute à tout ça un De Niro qui commence sérieusement à se parodier, un Sean Connery dans un très beau rôle (qu'il aura tendance à décliner inlassablement au fil de sa filmographie ou c'est moi?), deux couilles (Costner et Garcia), car, et c'est bien Brian, elles vont généralement par 2, une reconstitution d'époque qui se résume à un bout de rue qu'on filmera sous toutes les coutures.
De Palma, devenu un auteur reconnu, fait office de dinosaure en 1987, respecté sans être toujours compris. Applaudi ou sifflé, il dépose visiblement les armes pour honorer sa commande, délestant son art de son sel, cette tension sexuelle qui habitait son cinéma, était sa patte, son délire et qui faisait ma joie, mon admiration.
Brian commence à creuser ce trou qu'on ne devrait jamais creuser soi-même.
DjeeVanCleef
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le 15 juin 2014

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