Jean Dujardin et Gilles Lellouche ont décidément le vent en poupe : avec un million de spectateurs la première semaine, "Les infidèles" attire les foules, et le duo n'y est pas pour rien ! Fort de leur amitié à la ville comme à l'écran, les deux comédiens s'en donnent à coeur joie dans ce film à sketches qui leur permet de s'adonner à des numéros d'acteurs débridés et parfois totalement lâchés. Gilles Lellouche en prolétaire gérant de club échangiste et "sportif de haut niveau", Dujardin en employé coincé, monosourcil proéminent, le spectateur se divertit au grès des métamorphoses saugrenues des deux compères qui finissent par nous offrir un numéro queer qui atteint des sommets.
Les différents courts métrages qui composent ce film ne sont pas totalement dénués de lien entre eux : le premier répond ainsi au dernier, et les "pastilles" permettent d'introduire avec humour les protagonistes (Manu Payet, Guillaume Canet, excellent en fayot petit bourgeois) qui apparaissent dans le sketche des "Infidèles anonymes", de loin le plus réussi. Une Kiberlain au ton réprobateur fait face à une horde d'époux coureurs de jupons : ambiance maîtresse d'école et enfantillages sont au rendez-vous, le tout sur un ton caustique et hilarant.
Les situations cocasses, parfois potaches ou osées, ne dépassent jamais les limites de la vulgarité, ce qui permet au film de maintenir une ligne de conduite irrévérencieuse mais jamais grossière. L'humour est présent sous toutes ses formes : balourd, absurde, doux-amer, la palette de rire est large, et certaines scènes adoptent un ton plus grave, ce qui permet de créer un équilibre interne et de traiter le thème de l'infidélité en l'ancrant dans le réel, sans trop le distancier. Chaque spectateur peut, à un instant, se retrouver dans les personnages. Cette résonance avec la vie personnelle de chacun permet au film d'acquérir une dimension universelle et d'éviter de tomber dans l'écueil de la simple farce : les acteurs et les cinéastes ont choisi de réellement faire face au thème de l'infidélité, en posant de vraies questions, dénonçant certaines faiblesses masculines mais aussi les travers et les dérives de la société.
Enfin, malgré certains sketches moins réussis que d'autres, c'est la diversité des points de vue et des traitements qui donne au film sa richesse et sa singularité. En plus d'être un divertissement efficace et référencé (la séquence à Las Vegas convoque de nombreuses oeuvres américaines et se joue des clichés avec malice), "Les Infidèles" est un film pertinent qui fait réfléchir.