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La meilleure suite de l'Histoire du Cinéma,survenant dix-sept ans après l'opus initial.Le film est à nouveau écrit et réalisé par Denys Arcand,qui retrouve les mêmes personnages joués par les mêmes acteurs,ainsi que certains de ses collaborateurs du "Déclin de l'empire américain" comme le premier assistant Jacques Wilbrod Benoît ou le chef-op Guy Dufaux.Le film est centré sur Rémy,l'obsédé sexuel et boute-en-train de la bande,qui est atteint d'un cancer et vit ses derniers jours à l'hôpital.Son fils Sébastien,qui vit en Angleterre et avec qui il s'entend mal,vient cependant à Montréal et va tout faire pour adoucir la fin de vie de son père.Il est ici question de la mort,cet évènement terrifiant auquel personne n'échappe,mais aussi,comme dans le premier film,de bien d'autres sujets.Rémy,sentant sa fin proche,est contraint de se livrer au bilan de son existence.Il ne regrette rien,et il regrette tout parce que c'est ainsi,les choses ne sont jamais simples.Il a fait une honorable carrière de prof d'histoire à la fac,il a fait la fête avec ses amis et surtout il a fait l'amour à des tas de femmes,la grande affaire de sa vie.Mais maintenant qu'il est sur un lit à l'hosto,il réalise qu'il a manqué d'ambition,qu'il n'a jamais écrit le grand livre qui lui aurait permis de laisser une trace,que ses collègues et ses étudiants ont considéré son départ avec une indifférence totale,qu'il a par ses infidélités ruiné son mariage et surtout que son comportement l'a éloigné de ses enfants.Car on se rend compte soudain que les enfants étaient les grands absents du "Déclin".Et là ils reviennent en force.Sylvaine,la fille de Rémy,parcourt les mers en solitaire du côté de l'Australie tandis que Sébastien,trader à Londres,a avec son paternel des rapports tendus.Il y a aussi Nathalie,la fille de Diane,celle-là même qui dans le film précédent surprenait sa mère au lit avec Rémy,qui est une paumée et une junkie,ce qui aura son utilité.Pendant que leurs parents festoyaient,refaisaient le monde et jouissaient sans entraves,ces enfants délaissés ont grandi en se construisant contre leurs aînés.Sébastien,faiseur de fric accro aux jeux vidéo, et son père habitent deux planètes différentes et ne se comprennent pas,Sylvaine a pris la fuite,Nathalie est une écorchée vive qui refuse l'aide de Diane.Mais au fond tout ça est normal car ces parents,pour imparfaits qu'ils soient,ne sont eux-mêmes que les produits de leur milieu et de leur époque.C'est là qu'on retrouve le concept du déclin occidental,qui a évolué pour aboutir aux invasions barbares du titre.Ce dernier terme est exprimé par Alain dans une interview qu'il donne à la télé.Le jeunot de la bande,naïf et hésitant dans les eighties,est devenu à son tour une référence intellectuelle,comme l'était Dominique dans "Le déclin".Il situe le début des invasions barbares à septembre 2001,avec les attentats de New York,mais elles ont commencé avant et sont le fruit d'un long et lent processus.Ce concept peut désigner l'immigration massive de populations qu'on qualifiera poliment de moins civilisées que la nôtre,envahissant l'Occident depuis quelques décennies,mais ça va bien au-delà de ça et désigne la décadence de nos sociétés libérales gangrenées de toute part,car les barbares sont partout.Arcand décrit un monde en pleine débandade où une Eglise désertée par ses fidèles ne comprend pas les raisons de cette désaffection et brade ses possessions afin de survivre,où la machine sociale est paralysée par une fonctionnarisation pléthorique et incompétente,où des syndicats délinquants font la loi en sous-main,où des policiers démotivés laissent filer les trafics,où l'argent public est gaspillé sans contrôle et où une jeunesse inculte s'étourdit dans la drogue.Cet univers déprimant résulte du triomphe d'un matérialisme induit par un progrès technique tout-puissant qui a détruit et remplacé les vieilles croyances et les anciens modes de vie.Plus qu'un Dieu désormais:l'argent.Celui dont Sébastien dispose à foison,celui qui permet de s'offrir une chambre individuelle dans un hôpital surpeuplé,d'acquérir de l'héroïne en se cachant à peine,d'obtenir tous les passe-droits possibles et imaginables.Ironie suprême,c'est Rémy,le gaucho vitupérant constamment contre le capitalisme,qui va bénéficier des bienfaits de ce fric.Tout s'achète,se monnaye et se vend,y compris le respect et la sympathie,comme en témoigne l'atroce scène de la visite des étudiants,qui crée un vrai malaise.Il ne faut cependant pas croire que le cinéaste se cantonne à ce constat tragique d'une société à la dérive.Comme dans "Le déclin",l'humour des personnages et leur parler cash confèrent par moment au film une intense drôlerie,les dialogues extrêmement brillants et cyniques provoquant régulièrement le rire.Et puis la cohésion de la bande d'amis est au rendez-vous,comme elle l'était dix-sept ans auparavant.Ils se sont éparpillés,un peu perdus de vue,ont suivi des voies différentes,mais l'amour qu'ils se portent est indéfectible et ils sont tous venus soutenir Rémy dans ses derniers instants.Arcand dessine en outre de subtiles interactions entre les personnages qui entraînent des séquences d'une grande émotion et d'une infinie douceur,qu'il traite la plupart du temps par des scènes courtes et signifiantes closes par des fondus au noir.Et naturellement il y a la base de l'histoire,cet amour compliqué mais bien réel entre les parents et les enfants,avec au premier chef la relation complexe unissant Sébastien et Rémy,le jeune homme faisant tout pour que son père puisse avoir la mort la plus digne et la plus douce possible.Ils se déclareront leurs sentiments un peu tard mais le feront toutefois,au fil de scènes finales à vous déchirer le coeur,toute la bande allant en finir là où le diptyque avait commencé,au bord de ce lac où ils ont été si heureux,dans ce chalet qu'on retrouve tel qu'il était autrefois.Dire que les comédiens sont bons est un euphémisme.Ils jouent tous les rôles de leur vie et font corps avec leurs personnages.Ils ont vieilli,certes,mais plutôt bien.Rémy Girard campe un homme épaissi au bout du rouleau et livre une performance plus grave que la première fois,sans perdre cependant son efficacité d'histrion.Pierre Curzi,l'ami inséparable,a encore cédé à son penchant pour la chair fraîche et se voit flanqué d'une épouse et de deux enfants beaucoup trop jeunes pour lui.Dominique Michel,seule et fatiguée,n'a pas trouvé l'amour et y a renoncé,alors que Louise Portal ,alias Diane,navigue entre une sexualité toujours exigeante et les problèmes de sa fille.Yves Jacques,qui incarne Claude, est très classe dans l'emploi de l'homosexuel distingué et sarcastique.Dorothée Berryman est Louise,l'ex de Rémy,qui lui reste attachée en dépit des avanies qu'il lui a fait subir.Daniel Brière réapparait brièvement à travers un écran de télé dans le rôle d'Alain.Et il y a les nouveaux,choisis eux aussi parmi la fine fleur des acteurs canadiens.L'humoriste Stéphane Rousseau est tout simplement extraordinaire en fils déchiré entre rancune et amour,et Marie-Josée Croze,primée à Cannes pour sa performance,est bouleversante en jeune femme larguée essayant de refaire surface.Notre française Marina Hands confirme son talent sûr en fiancée dévouée de Sébastien.D'autres stars québécoises sont du voyage,à l'instar du très charismatique Roy Dupuis,qui apparait peu mais se montre marquant en policier désabusé.

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le 16 avr. 2020

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