C'est marrant.
J'étais aux chiottes. Juste pour me laver les mains, tu sais. C'était dans un centre commercial et il y avait ce vieux. Tu sais, il faisait son pipi dans une des quatre pissotières alignées derrière moi. En sifflotant.
Moi, je savonnais mes mains, elles étaient pleines de cambouis. Je ne sais plus où j'avais été les fourrer. En attendant, je voyais le lavabo prendre une teinte bien crado.
Tiens, le rossignol part dans les aigus avec fausses notes, il doit entrer dans la zone qu'on appelle : dernière goutte.
Bingo ! Le mec se retourne en fermant sa braguette et là, le choc ! C'est Walter Matthau! Le même nez Bintje, la même trogne de Droopy humain. Walter qui pissait derrière moi !
Bon, je t'entends d'ici : «Mais c'était quand c't'histoire ? Il est pas mort, le Walter ? Tu vas essayer de nous faire croire que tu te laves les mains ??? ».
J'ai envie de dire stop. Je sais bien que ce n'est pas le vrai. Le vrai doit avoir un mec avec un seau pour quand il veut pisser. C'est pas le genre à s'épancher dans les centres commerciaux.
Je ne le quitte pas des yeux quand même. Il va forcément se laver les mains, il se dirige vers moi. Crotte, carrément pas! Le mec se plante devant la machine à sécher les mains, il y glisse ses paluches et, en me faisant un clin d'oeil, il lâche : « Ça marche bien, ces machines, tu sors, t'es tout sec ». Et le mec se barre. Normal. Me laissant devant mon lavabo gris.
Et puis j'ai pensé à « The Taking Of Pelham 123 », polar seventies avec la basse qui claque bien comme il faut, des méchants à moustaches et de la joute oratoire derrière un gros micro en fer. New-York belle comme jamais, vue de sous la terre.
Étonnante variation sur le thème de la prise d'otages à but purement lucratif où les malfaisants s'en prennent au métro et aussi à ceux qui sont dedans.
On suit ce coup, sa mise en place qui ne laisse rien au hasard, c'est tendu car presque en temps réel, filmé sans esbroufe mais foutrement efficace. Tendu comme la peau du slip.
Un flic débonnaire, des mecs qui s'appellent par des couleurs. Euh, attends, comme dans Reservoir Dogs ? Ouais, ma couille, tout pareil. Du Robert Shaw, du papa de Ben Stiller qui cherche à allumer ses clopes avec une gazinière pleine de flouze, du Martin Balsam qui a pris froid et du Walter Matthau qui ne se lave pas les mains après avoir fait pipi.
C'est une honte.
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