La politique n’est pas forcément un sujet qui plaît à tous. Et ce n’est pas non plus un sujet très courant sur le grand écran et pourtant ce domaine nous a offert quelques pépites. En France on se souvient par exemple de « L’exercice de l’état » ou de « Quai d’Orsay » et aux États-Unis de l’excellent « Les Marches du pouvoir » qu’avait mis en scène Georges Clooney. Ces films ont su rendre ce sujet intéressant et divertissant. Pas sûr que « Les Promesses » soit aussi tout public, si on peut qualifier les œuvres citées précédemment comme telles. En effet, cette œuvre est plutôt austère et complexe et il faut s’accrocher quand on ne goûte pas à ce milieu élitiste et si particulier. C’est peut-être son principal défaut d’ailleurs: d’être réservé à une base de spectateurs courageux et aptes à ce type de sujets. Mais si on aime cela ou que l’on fait l’effort, ce long-métrage est passionnant de bout en bout.
Second film de Thomas Kruithof après « La Mécanique de l’ombre », un film qui braconnait déjà un peu dans la sphère politique, il nous déroule une histoire qui sur le papier ferait fuir n’importe qui par son côté à la fois banal, nébuleux et, à priori, inintéressant. Mais par la grâce d’un scénario d’une précision chirurgicale rare, ultra méticuleux et particulièrement documenté, toutes ces réserves sautent les unes après les autres. On est littéralement plongé dans la vie d’une mairesse d’une grande ville de banlieue tiraillée entre un problème de rénovation d’une cité insalubre, une nouvelle course aux municipales et la possibilité de devenir ministre. Tout est décortiqué avec attention dans les moindres détails et on ressent le réalisme des situations comme jamais. On les vit presque et c’est peut-être ce qui, comme par magie, permet de nous captiver avec un récit de prime abord presque répulsif. Et cette histoire anodine et banale de gestion d’une ville et de rapports de hiérarchie politique de devenir addictive et aussi tendue qu’un thriller. Mais il faut s’accrocher, c’est complexe et peut-être que la partie avec le logement aurait pu être remplacée par un sujet plus compréhensible par tous. Qu’importe, pour ceux qui font l’effort c’est un rollercoaster cinématographique et politique.
La mise en scène est aussi froide, distancée et clinique que le sujet. Tout est gris. Comme tous ces relations de forces, ces arrangements, cette corruption et ces mensonges propres à un corps politique généralement pas net et gangréné par la corruption. Mais « Les Promesses » ne se fait pas dénonciateur, il est juste réaliste, objectif et dissèque avec précision ce qu’est le monde de la politique aujourd’hui, d’une manière presque documentaire. Mais tout ceci serait bien moins réussi si Isabelle Huppert ne nous offrait pas encore une de ces compositions magistrales, impeccables et absoute de toute critique. Elle est incroyable dans la peau de cette mairesse, juste plus vraie que nature. Et Reda Kateb lui tient la dragée haute, c’est dire, dans un pas de deux parfait. Ce long-métrage c’est une heure et demie de joutes politiques jubilatoires et excitantes, de dialogues ciselés, de retournements de situation qui tiennent en haleine et d’informations passionnantes. Alors ce n’est peut-être pas très avenant vu de l’extérieur et peut-être que le sujet n’est pas très attirant, mais tout bon cinéphile ne peut qu’admirer les qualités intrinsèques et instructives de cette chronique politique et sociale magistrale.
Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.