A trop taper sur Luc Besson réalisateur, on oublie un peu vite que c'est Luc Besson producteur qui fait le plus dégâts. Pourtant, même les plus gros poissons ne sont pas à l'abri d'une bonne blague. Les Rivières pourpres 2 en est une de taille, à tel point qu'on se demande comment cet OVNI a pu débouler en grande pompe sur les écrans français, il y a maintenant dix ans. Petit retour en arrière...


Nous sommes en 2004, et Luc Besson a déjà un empire à sa botte. Il s'appelle Europa mais son règne concerne surtout notre chère patrie. Si quelqu'un a du pouvoir en France, c'est bien lui. Il est "le Spielberg français", comme le surnomme Laurent Weil, à qui on laisse la paternité de la formule. A vrai dire, il n'a qu'à éternuer pour que s'affolent les actionnaires de Kleenex. Lever des fonds ? Pas un problème. Trop vite caricaturé par ses détracteurs, Besson a bel et bien changé l'industrie du cinéma français.


Ses films marchent chez nous et cartonnent aux USA (allez donc voir les chiffres du Transporteur et des Taken, ça donne le vertige). En d'autres termes, ami(e)s cinéphiles : cet homme dont les productions amassent la caillasse sous une volée de bois vert pourrait redonner ses lettres de noblesses au cinéma de genre français, donner les coudées franches à des cinéastes qui en veulent et, avec une audace régulière (comme Haute tension), offrir un cinéma de genre gaulois qui ait les moyens de ses ambitions.


Malheureusement, un film synthétise assez bien la philosophie de la boîte : Banlieue 13 Ultimatum, sorti en 2009. Actioner imbuvable, le film sert à la soupe aux jeunes de banlieue avec une stupidité tellement énorme qu'elle passe pour un bon esprit de série B ritale. Rappelons que cette suite se concluait sur un dialogue final où des cailleras au rabais pactisent tranquillement avec le chef de l'Etat, simili Sarkozy manipulé par ses méchants ministres. Faudel a perdu tous ses fans suite à son accointance avec la droite, mais pour La Fouine, ici en guest-star, ça passe tranquille !


Alors ok, en 2004, Europa a déjà produit/distribué moins fédérateur que "Les Rivières pourpres 2" : le très gore Haute tension d'Alexandre Aja, déjà cité, l'étrange La Turbulence des fluides... Plus tard, en 2008, c'est le survival Frontière(s) qui voguera sous ses couleurs. Mais ce ne sont pas des films de stars, et ils ne font pas partie de franchises. Les Rivières pourpres 2, en héritier involontaire de Uwe Boll et Pitof, propose un plan-séquence sur un cul de douanier, des moines ninjas qui se fightent en plein supermarché, une poursuite à pied en scrolling horizontal rehaussée de zoom aléatoires, des répliques à rendre jaloux les Inconnus ("Ben alors Jésus, faut rester dans les clous !"), un bad guy que même Christopher Lee ne sauve pas du grotesque...


Le gouffre qui sépare ce qu'est le film de ce qu'il voudrait être est comblé par des post-it, des idées jetées au hasard, histoire de dépenser les sous-sous de tonton Luc. Et le réalisateur dans tout ça ? "J'ai toujours eu envie de faire une nuit jaune, et il m'a laissé faire", déclare le chef op' en bonus. Super coco, il est conciliant ton boss ! Et on sent que le bonhomme, Olivier Dahan, se fout bel et bien de son film comme de l'an 40. Il le laisse se faire tout seul. Résultat : chaque comédien joue comme il veut. Reno s'emmerde comme un rat mort, rendant l'investissement physique de son acolyte Benoît Magimel immédiatement comique, pendant que le reste du cast prononce des phrases bêtement sentencieuses avec un sérieux imperturbable. Et comme on n'est plus ça à près, l'hideux générique nous annonce la participation exceptionnelle de Johnny Hallyday, qui porte fort bien la salopette et le cache-oeil.


Les Rivières pourpres 2 a beau détoner au sein de la filmo d'Europa, ce n'est pas une raison pour la ramener. Il propose un univers sombre, de la violence, veut brasser mysticisme, occultisme et fantastique... Mais il se rate inlassablement, la faute à un script qui va directement du point A au point Z, bien aidé par une réal qui fait n'importe quoi du moment qu'elle enregistre quelque chose. Avec un bon cinéaste à la barre et un scénariste plus concerné que l'ami Luc, je reste convaincu qu'on aurait pu se taper un polar lugubre et inquiétant à la Seven. En l'état, cette séquelle me cause une crise de rire suffisamment intense pour en oublier qu'elle a coûté 23 millions !


Et alors que la critique française massacre sans pitié les B13, voilà qu'elle couvre d'éloges ce nanar grandiose (je n'invente rien, jetez un oeil au dos du boîtier DVD). Peut-être le plus beau tour de force de cette prod en roue libre. M'enfin, à quoi bon lutter ? "Les femmes ont toujours une place importante dans vos films", disait un journaliste de France 2 à Luc Besson lors de la promo de Lucy au JT de 20h. Si cela consiste à mettre une chinoise en laisse pour qu'elle aille pisser dans un buisson, ma foi, il faut vraiment que je révise mes classiques, parce que j'ai dû mal juger Le Transporteur à l'époque.

Fritz_the_Cat
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le 8 août 2014

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Fritz_the_Cat

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Je trouve la plupart des commentaires très excessifs. Certes l'histoire n'a plus rien à voir avec le premier épisode, certes les scènes de violences sont très peu crédibles. Mais l'on ne me fera pas...

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