Encore un film traitant de l'absurdité de la justice de guerre, je dirais même "LE" film précurseur et modèle sur ce sujet.
D'abord, j'ai été surpris de voir la puissance émotionnelle et la sincérité du film (passant surtout par celle de son personnage principal: le colonel joué par Kirk Douglas) sachant que c'est un film du grand Stanley Kubrick. En effet, ce dernier est plus connu pour avoir un style très froid, très distant, ce qui n'est pas le cas ici.
On retrouve cependant son cynisme habituel, critiquant les hommes de pouvoir égoïstes et lâches et cette justice manipulée et juste là pour "légitimer" les condamnations déjà décidées même avant le début des procès.
A noter que la même année, en 1957, sortait le Pont de la rivière Kwaï, un autre film traitant un sujet qui dérange: un homme se retourne contre son pays en guerre après avoir été prisonnier chez l'ennemi.
Ici, le film se concentre sur des faits historiques de la 1ère guerre mondiale, plus précisément sur un assaut qui, comme tant d'autres, coûtera la vie à des milliers d'hommes pour zéro centimètre gagné. Dès lors, chaque officier à la tête d'une division devra choisir un homme parmi les siens. Cet homme sera jugé devant la cour martiale pour lâcheté devant l'ennemi, un crime de guerre puni par la mort. Nous suivrons un colonel dévoué à ses hommes, interprété par Kirk Douglas, qui tentera de les défendre pour sauver leur peau.
Il faut souligner la performance de M. Douglas qui campe un personnage attachant portant un regard acéré sur cette "pseudo-justice" et conservant du recul sur ce qui ce passe (la fin dans le bar en est un bon exemple). Berf, il est touchant.
Mais soulignons par ailleurs que chaque personnage est profondément humain (et c'est ce qui fait peur au passage), pas de manichéisme ridicule qui aurait enlevé tout l'intérêt du film. Même les "méchants" se comportent juste comme des humains que la guerre a détruit, déshumanisés par tant d'horreur vécue et qui, maintenant, laisse leur instinct primal parler pour eux, pouvant les pousser à commettre des actes parfaitement inhumains. D'autres pensent que le seul moyen qu'ils ont de sauver leur peau c'est d'être égoïstes, menteurs et perfides.
Enfin, c'est le premier Kubrick que je vois avec si peu de "Kubrick" : la mise en scène est assez sobre, les décors restent bons sans être grandioses (question de budget sans doute), et surtout la musique est quasiment absente. Après, je ne sais pas, peut être qu'il n'a commencé à mettre de la musique classique partout qu'à partir de 1968 avec 2001, l'Odyssée de l'Espace. Tout cela n'est pas pour me déplaire, n'étant pas vraiment fan de son style. Surtout que ce choix donne la part belle aux acteurs et aux dialogues très importants ici.
Bref! Les Sentiers de la Gloire est un incontournable des films de guerre et le moins "Kubrick" des "Kubrick" que j'ai pu voir. Il démontre l'absurdité de certaines batailles et de la justice de guerre à travers un procès "fantôme" où les accusés n'auront aucune chance de s'en tirer. La vision acérée et cynique de Kubrick sied à merveille pour traiter un tel sujet. Ce fut donc une bonne surprise et un agréable moment.